LA RESTAURATION DU PÈLERIN
Psaume 126
Paulin BÉDARD*
Peuple du Seigneur,
La route du pèlerin est parsemée de joies et de larmes. Autrefois, les pèlerins montaient à Jérusalem pour célébrer les grandes œuvres du Seigneur. Sur la route, ils passaient par des hauts et des bas. Ils se souvenaient avec joie des grandes œuvres que Dieu avait accomplies pour eux. Dans leurs peines, ils espéraient que Dieu ferait encore de grandes choses. Nous aussi, nous sommes des pèlerins en route vers la nouvelle Jérusalem. Le Seigneur a fait de grandes choses pour nous. Il nous a restaurés dans sa grâce. C’est un sujet de grande joie. En même temps, le voyage n’est pas terminé. Nous avons besoin que le Seigneur nous restaure encore. Nous attendons une joie encore meilleure. Le Psaume 126 célèbre la restauration du pèlerin.
1. La joie de la restauration passée (Ps 126.1-3)
« Quand l’Eternel ramena les captifs de Sion, nous étions comme ceux qui font un rêve. » (v. 1) Le pèlerin regarde en arrière et se souvient d’une restauration que Dieu a déjà faite dans le passé. Il doit « se pincer » pour être sûr que cela est bien réel. C’est comme un rêve, et pourtant cela est bien réel. Dieu nous a ramenés ! Il nous a restaurés ! De quelle restauration s’agit-il ? Plusieurs pensent qu’il s’agit du retour de l’exil. Une partie d’Israël a été déportée à Babylone. Plus tard, à l’époque de Néhémie, Dieu les a ramenés en Israël. Oui, c’était comme un rêve. Ils ont été punis à cause de leurs péchés, déportés loin de la terre promise et Dieu, dans sa bonté, les a ramenés, il les a restaurés ! Il est possible, en effet, que le verset 1 parle de ce retour de l’exil, mais ce n’est pas certain. Le texte ne le dit pas.
L’expression « ramener les captifs », en hébreu, a un sens très large. Littéralement, on peut traduire : « L’Eternel retourna le retour. » Dieu a fait un retournement. Il a produit un renversement de situation. Le livre de Job contient la même expression : « L’Eternel rétablit la situation de Job. » (Jb 42.10) Job avait perdu ses richesses, ses enfants, sa santé, et Dieu a renversé la situation. L’expression doit donc être prise au sens large de restauration, de rétablissement, de renouveau. Toute l’histoire d’Israël est remplie de renouveaux et de renversements de situation.
Prenons, par exemple, la sortie d’Egypte. Israël était esclave en Egypte, dans la misère profonde. Dieu les a sortis de cette fournaise pour les conduire dans le pays promis. Quelle grande restauration ! Certains pensent que le Psaume 126 célèbre non pas le retour d’exil, mais la sortie d’Egypte, mille ans auparavant. Quand l’Eternel les délivra par son bras puissant, quand il fit périr les Egyptiens dans la mer, c’était comme un rêve. Du jour au lendemain, eux qui étaient des esclaves ont été libérés ! Il fallait « se pincer » pour vérifier que ce n’était pas un rêve. Plus tard, les pèlerins montaient chaque année à Jérusalem pour aller célébrer la fête de la Pâque. Ils marchaient en chantant les « Psaumes des montées ». Qu’est-ce qu’on célébrait lors de la Pâque ? La sortie d’Egypte ! L’Eternel ramena les captifs de Sion, prisonniers en Egypte. Il renversa la situation et les rétablit dans sa grâce.
Mais Dieu n’avait pas terminé. Plusieurs fois, l’Eternel a restauré son peuple. Il leur a donné des juges pour les délivrer de leurs ennemis : Gédéon, Samson, Samuel. Il les a délivrés de Sennachérib. Toute l’armée assyrienne encerclait Jérusalem. Ezéchias implora l’Eternel et Dieu envoya son ange, qui tua 185 000 soldats assyriens. Le lendemain matin, il fallait « se pincer » à Jérusalem, c’était comme un rêve. Les ennemis étaient disparus (2R 19).
Les pèlerins chantent le Psaume 126 pendant qu’ils montent à Jérusalem. Ils commémorent une restauration. Laquelle ? Sortie d’Egypte ? Libération des Philistins ? Mort de Sennachérib ? Retour de l’exil ? Nous ne savons pas et il n’est pas nécessaire de le savoir. L’important, c’est de voir la réaction. Quelle est la réaction des pèlerins ? La joie ! « Alors notre bouche riait de joie, et notre langue poussait des cris de triomphe. » (v. 2) La joie d’être délivrés des Egyptiens, la joie d’être épargnés par les Assyriens, la joie d’être ramenés d’exil. L’événement est tellement surprenant, tellement inattendu qu’il déclenche un rire presque incontrôlable. La bouche est remplie de rires joyeux. La langue pousse des cris de joie. Les choses allaient vraiment mal, mais Dieu a fait pour eux une œuvre très grande. Il a renversé la situation. On s’émerveille de ce que Dieu a fait ; cela provoque l’étonnement et la joie ! Les pèlerins expriment leur émotion avec passion, la passion de louer l’Eternel. Nous étions dans la misère et nous sommes libres ! Quel soulagement et quelle joie !
Même les païens autour d’eux le voient et le savent. « Alors on disait parmi les nations : L’Eternel a fait pour eux de grandes choses ! » (v. 2) Quand les deux espions sont allés à Jéricho, Rahab, la prostituée, leur a dit : « L’Eternel, je le reconnais, vous a donné ce pays, la terreur que vous inspirez s’est abattue sur nous, et tous les habitants de ce pays défaillent devant vous. Car nous avons appris que l’Eternel a mis à sec devant vous les eaux de la mer des joncs, lors de votre sortie d’Egypte (…). » (Jos 2.9-10) Quand Dieu fait du bien à son peuple, il s’arrange pour que les nations païennes le sachent. Même chose au retour de l’exil : « Les nations reconnaîtront que je suis l’Eternel qui sanctifie Israël (…). » (Ez 37.28) L’Eglise s’en réjouit et répond : amen ! « L’Eternel a fait pour nous de grandes choses ! Nous sommes dans la joie ! » (v. 3)
Aujourd’hui, nous sommes venus célébrer ensemble les grandes choses que l’Eternel a faites pour nous ! Sommes-nous dans la joie ? Quand l’Eternel a renversé la situation de son peuple, quand Dieu a envoyé son propre Fils dans le monde, quand Jésus est mort sur la croix pour payer notre dette, quand nous étions esclaves de nos péchés et qu’il nous en a libérés, quand nous étions prisonniers de la condamnation et de la mort et qu’il nous a acquittés, « nous étions comme ceux qui font un rêve ». Tout cela semblait trop beau pour être vrai. Il fallait « se pincer » pour être sûr et certain que c’était bien réel. Oui ! c’est réel ! « Alors notre bouche riait de joie, et notre langue poussait des cris de triomphe ! »
Les païens regardent l’Eglise et se disent : « Le Seigneur a fait pour eux de grandes choses ! » Et l’Eglise répond : amen ! « L’Eternel a fait pour nous de grandes choses ! Nous sommes dans la joie ! » Le Seigneur a fait de grandes choses dans nos vies. Il a complètement renversé la situation. Il nous a délivrés de nos péchés par son Fils. Il nous a donné son Saint-Esprit. Il nous a fait connaître sa Parole. Il a régénéré nos cœurs. Il nous a fait passer de la mort à la vie. Il nous a restaurés dans sa grâce. Chaque fois que nous nous éloignons, il nous ramène à lui. Il nous a fait du bien tellement souvent ; cela devrait provoquer l’étonnement et la joie ! Sommes-nous dans la joie ? Quand nous chantons ensemble des chants joyeux en son honneur, avons-nous le cœur abattu, le visage triste et la bouche qui marmonne, ou nos cœurs et nos bouches expriment-ils des chants joyeux ? Bien sûr, dans la vie chrétienne, il y a des peines et des tristesses, il y a des moments plus difficiles. La route du pèlerin est parsemée de joie et de larmes, mais la joie devrait prédominer, parce que le Seigneur a fait pour nous de grandes choses ! Il nous a restaurés par Jésus-Christ !
Le pèlerin regarde en arrière et se réjouit, parce qu’il se rappelle que Dieu a déjà fait de grandes choses pour son peuple. Mais que Dieu fait-il maintenant et que pouvons-nous espérer pour l’avenir ? Pouvons-nous avoir confiance que le Seigneur va encore nous restaurer ? Oui, certainement ! Le pèlerin regarde en avant, plein d’espérance.
2. L’espérance de la restauration à venir (Ps 126.4-6)
Le pèlerin se souvient que Dieu a déjà restauré son peuple. Ensuite, que fait-il? Il prie, il demande au Seigneur : « Fais-le encore ! » « Eternel, ramène nos captifs comme des torrents dans le Négueb. » (v. 5) « Ramène nos captifs », c’est-à-dire « restaure-nous ». Nous retrouvons la même expression qu’au verset 1. « Retourne un retour. » « Renverse la situation encore une fois. » Pour les chrétiens, la mémoire du passé n’est pas de la nostalgie : « Ah, autrefois, c’était le bon vieux temps ! » Non, la mémoire du passé nous donne une raison de prier et d’espérer que Dieu agira encore. « Tu l’as déjà fait… fais-le encore. » « Merci – je t’en prie. » Tu nous as fait sortir d’Egypte ! Quelle joie ! Merci ! Maintenant, je t’en prie, délivre-nous de Sennachérib. Tu nous as délivrés de Sennachérib. Quelle joie ! Merci ! Maintenant, je t’en prie, fais-nous sortir de Babylone et ramène-nous dans notre pays. Tu nous as envoyé ton Fils bien-aimé, tu nous as délivrés de nos péchés, tu nous as justifiés ! Quelle joie ! Merci ! Maintenant, je t’en prie, sanctifie-nous, transforme-nous. Tu nous as donné ton Saint-Esprit. Nous sommes dans la joie ! Merci ! Maintenant, je t’en prie, que ton Saint-Esprit nous fasse porter encore plus de fruit.
Telle est la prière du pèlerin en marche vers la nouvelle Jérusalem. Cette prière n’est pas seulement pour lui, elle est pour toute l’Eglise. Tu nous as placés dans ton Eglise. Tu nous as donné des anciens, des diacres, des frères et sœurs avec toutes sortes de beaux talents. Merci, Seigneur ! Tu nous donnes le privilège d’entendre ta Parole chaque semaine. Merci pour les enseignements, merci pour le groupe de jeunes, merci pour toutes les personnes qui ont un amour pour toi et pour ton Eglise. Nous sommes dans la joie parce que le Seigneur a fait pour nous de grandes choses. Maintenant, nous t’en prions, continue, Seigneur. Fais-le encore. Restaure-nous encore ! Produis un renouveau dans nos cœurs et dans ton Eglise. Ramène ceux qui se sont éloignés. Fortifie nos mariages et nos familles. Donne à nos jeunes une plus grande maturité. Fais-nous grandir. Ajoute de nouveaux chrétiens dans l’Eglise.
« Eternel, ramène nos captifs comme des torrents dans le Négueb. » Le Négueb est une région assez désertique au sud de la Palestine. L’été, il y fait chaud, l’air y est sec. L’herbe a de la difficulté à pousser. Puis, soudainement, la pluie transforme le paysage. Des torrents jaillissent, puissants et rafraîchissants. En l’espace d’une journée, les fleurs se mettent à pousser. C’est l’image d’une restauration puissante, presque instantanée. C’est l’image de la souveraineté de Dieu capable de transformer un désert en jardin luxuriant. « Le désert et le pays aride s’égayeront; la steppe tressaillira d’allégresse et fleurira comme un narcisse; elle se couvrira de fleurs et tressaillira avec chants d’allégresse et de triomphe. » (Es 35.1-2) « Car je répandrai des eaux sur le sol altéré et des ruisseaux sur la terre desséchée ; je répandrai mon Esprit sur ta descendance et ma bénédiction sur ta progéniture. Ils germeront au beau milieu de l’herbe. » (Es 44.3) Le Saint-Esprit est comme une eau pure déversée sur un sol desséché.
Vous connaissez des gens autour de vous qui sont morts spirituellement ? Le Saint-Esprit est capable de produire un renversement dans leur vie. Et vous-mêmes, il vous arrive peut-être de passer par des sécheresses spirituelles ? Il nous arrive tous de traverser des déserts. Nous perdons de l’intérêt pour la Parole de Dieu, nous prions moins, nous sommes moins fervents, nous prenons nos distances par rapport à des frères et sœurs dans l’Eglise. Dieu est capable de transformer nos vies en profondeur. Depuis la Pentecôte, l’Esprit Saint continue d’arroser l’Eglise comme un torrent d’eau fraîche.
Le pèlerin prie. Il espère un renouveau. Il espère tellement qu’il se met au travail. Il nous encourage à travailler pour qu’un renouveau se produise. Le Psaume 126 contient deux images. Première image, des torrents dans le Négueb : c’est l’image de la souveraineté de Dieu. Il est capable d’agir quand il veut, en un instant s’il le veut. Deuxième image, la semence et la moisson. C’est l’image de la responsabilité humaine. Retroussons nos manches et mettons-nous au travail. « Ceux qui sèment avec larmes moissonneront avec cris de triomphe. Celui qui s’en va en pleurant, quand il porte la semence à répandre, s’en revient avec cris de triomphe, quand il porte ses gerbes. » (v. 6)
Dieu nous a déjà restaurés dans le passé, alors nous prions : « Seigneur, fais-le encore. Restaure-nous encore ! » La prière est nécessaire, mais une fois qu’on a prié, on se lève, on prend son sac de graines et on va semer ses graines. Le renouveau spirituel est toujours l’œuvre du Dieu souverain, mais n’oublions jamais la responsabilité humaine. Dieu nous appelle à prier et ensuite il nous appelle à travailler. Il nous demande de semer nos graines avec la promesse suivante : Dieu produira le renouveau au moyen des graines que nos mains auront semées. Nous sommes co-ouvriers avec Dieu, dit l’apôtre Paul (1 Co 3.9).
Le travail d’un fermier est un travail exigeant. Il faut travailler dur, se lever tôt, se coucher tard, être à son affaire, labourer, patienter, persévérer. Oui, la joie prédomine dans la vie chrétienne, mais il y a aussi des larmes : « Ceux qui sèment avec larmes… Celui qui s’en va en pleurant, quand il porte la semence à répandre… » Pourquoi des larmes ? Parce que le travail est exigeant, parce que la terre n’est pas facile à cultiver, parce que nous risquons même de perdre nos graines. Nous ne connaissons pas l’avenir. Nous ne savons pas si nos graines vont germer, si nos efforts vont produire quelque chose. Il y a des risques et il faut du temps avant de voir le résultat. Souvent nous manquons de patience, nous imaginons des résultats instantanés.
Oui, le Seigneur a promis de nous restaurer, mais il n’a jamais dit que le processus serait facile. Dieu est souverain et peut produire une transformation radicale en un instant, comme avec un torrent qui jaillit. Mais Dieu nous demande aussi de semer et de patienter. Il faut du temps avant de récolter la moisson. Il ne faut pas se décourager si les fruits sont encore peu abondants. Je parle des fruits dans nos propres vies, nos progrès spirituels. Je parle des fruits dans l’Eglise, l’épanouissement de l’Eglise. Je parle aussi des fruits dans l’évangélisation, des nouvelles conversions.
Jésus a semé avec larmes. Il a semé à grands cris. Il a travaillé dur, il a souffert, il est mort, il a été enseveli, comme une graine ensevelie dans la terre pour ensuite produire une belle récolte. Il a supporté la croix, méprisé la honte, « en vue de la joie qui lui était proposée » (Hé 12.2). Aujourd’hui, il est assis sur son trône, à la droite de Dieu. Il est entré dans la gloire et la joie. Il récolte abondamment ce qu’il a semé. Il rassemble son peuple des quatre coins de la terre. Il nous a confié la semence de sa Parole. Allons, nous aussi, semer en pleurant, dans nos vies, dans nos familles, dans l’Eglise et dans le monde. Plus tard, nous récolterons dans la joie. « Ceux qui sèment avec larmes moissonneront avec cris de triomphe. » C’est une promesse !
Nous vivons dans un entre-deux. Le Seigneur nous a déjà restaurés. Il a promis de nous restaurer encore. Nous sommes déjà dans la joie. Pourtant, nous semons dans les larmes. Un mois plus tard, une année plus tard, plusieurs années plus tard, nous récolterons dans la joie. Dieu nous fait porter des fruits déjà sur cette terre. Un jour, ce sera la grande récolte finale. Soyons patients et persévérants. Ayons confiance qu’un jour, quand Jésus reviendra, il complétera parfaitement son œuvre de restauration. Ce jour-là, nous entrerons dans la nouvelle Jérusalem. Le Seigneur essuiera toute larme de nos yeux (Ap 21.4). C’est une promesse ! Nous serons réunis avec tous les pèlerins de l’Ancien et du Nouveau Testament. Nous porterons tous ensemble nos gerbes dans une joie complète. Nous chanterons ensemble un chant nouveau, le chant de la grande moisson, le chant de la restauration pleinement accomplie. Nous serons dans la présence de Jésus et nous crierons : Oui, l’Eternel a vraiment fait pour nous de grandes choses ! Nous sommes dans la joie ! Amen.