« Mais le plus grand, c’est l’amour » – Un regard sur 1 Corinthiens 13

« Mais le plus grand, c’est l’amour »
Un regard sur 1 Corinthiens 131

Donald COBB2

Le plus grand problème de 1 Corinthiens 13 est sans doute que, plus on multiplie les explications à son sujet, moins on en dit en réalité. De fait, ces mots de l’apôtre, parmi les plus beaux de l’Écriture, ne sont pas difficiles parce qu’ils seraient obscurs ; si le lecteur y éprouve une certaine gêne c’est, le plus souvent, parce qu’ils sont au contraire trop clairs ! Faire un article sur ce chapitre risque donc fort d’en diminuer la force au lieu de l’accroître. On a comparé parfois l’exégèse – l’explication du texte biblique – avec la dissection d’une grenouille : se prêter à une telle activité permet de connaître tous les organes, tous les composants de ce qu’on étudie… mais la grenouille n’est plus vivante. Il en serait de même du travail exégétique. Le danger existe, en effet, de réduire le texte vivant à une simple énumération des éléments qui le composent, tout en lui enlevant sa capacité d’interpeller, de parler et de transformer.

Et pourtant, il y a dans ce chapitre des aspects qui méritent que l’on s’y attarde. Il n’est donc pas inutile d’entrer un peu dans les détails du texte… en essayant, si possible, de maintenir en vie ce que nous étudions ! C’est-à-dire en faisant, non pas une dissection mais, en quelque sorte, une vivisection ; ou – peut-être mieux – en peignant un tableau, en essayant de saisir ce texte dans toute sa beauté et avec toute sa pertinence. C’est ce que nous voulons tenter dans le présent article.

A. Le contexte à Corinthe

Avant d’entrer dans le vif du sujet, disons quelques mots sur le contexte. Une première lecture, superficielle, de ce chapitre pourrait donner l’impression que Paul, en pensant aux liens de communion qu’il partage avec ses lecteurs, se laisse tranquillement aller à une description poétique de ce qu’il vit avec eux, et de ce que les membres de l’Église vivent les uns avec les autres. Le résultat est ce qu’on appelle souvent « l’hymne à l’amour »3. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que ce chapitre revient régulièrement comme texte choisi par les jeunes couples qui préparent leur cérémonie de mariage…

Et pourtant, la situation à Corinthe était tout sauf paisible ! La première épître aux Corinthiens est en fait, avant tout, une lettre de reproches, visant à redresser des comportements qui divisaient la communauté et relevaient par moment du paganisme, notamment en matière de mœurs sexuelles. On y trouve : esprit de parti (chap. 1-4) ; inceste (chap. 5) ; procès juridiques entre membres de la communauté et fréquentation des prostituées (chap. 6) ; participation à des banquets orgiaques dans les temples païens (chap. 8-10) ; discrimination entre riches et pauvres (chap. 11) ; mise en doute de la résurrection finale (chap. 15)… pour ne mentionner que les points les plus évidents ! Et, au milieu de tout cela, il y avait une pratique très poussée, du moins par certains, de ce que Paul appelle les pneumata ou charismata : les « dons spirituels », accordés par l’Esprit pour l’édification de la communauté4. Ce qui était surtout prisé était le parler en langues (ou la glossolalie), comme aussi – mais dans un moindre degré, apparemment – la prophétie5.

Pourquoi ces charismata-là ? Parce que, du fait que celui qui les possédait pouvait les utiliser de façon visible au sein de la communauté, ils permettaient de distinguer – dans l’esprit des Corinthiens, en tout cas – entre ceux qui avaient l’Esprit de Dieu et bénéficiaient de son action, et ceux qui ne l’avaient pas. Et, par conséquent, entre ceux qui avaient atteint un certain niveau spirituel… et les autres. En clair, l’utilisation de ces pneumata donnait surtout l’occasion à ceux qui les pratiquaient de se mettre eux-mêmes en avant : c’étaient eux qui – comme on dirait aujourd’hui – avaient « une ligne directe » avec l’Esprit, qui possédaient la connaissance de la révélation divine. Au chapitre 12, Paul soulignera l’importance de réfléchir au sujet de ces dons dans le cadre de l’Église, corps du Christ. Il parlera de la nécessité de prendre soin des membres les moins « honorables » pour que le corps croisse, fonctionne normalement et soit en bonne santé6. Au chapitre 14, il entrera dans les détails sur la façon de pratiquer – ou non – le parler en langues dans le culte, et la place plus prééminente de la prophétie : c’est-à-dire d’un message, adressé à tous, qui « édifie, exhorte et console » (1Co 14.3). Entre les deux chapitres, et comme un joyau serti au centre de son cadre, viennent ces versets décrivant le charisma essentiel, qui, seul, peut donner une validité à tous les autres charismata7. D’une certaine façon, il ne s’agit pas tant d’un don parmi d’autres que de ce qui doit sous-tendre l’ensemble des dons et déterminer la façon dont ils s’exerceront8.

B. Un regard sur le texte

Sans entrer dans les détails, faisons simplement une remarque d’ordre général sur la structure de ce chapitre. 1 Corinthiens 13 peut être divisé en trois parties avec, au verset 13, une conclusion résumant le propos central. Je propose de regarder, pour chacune de ces parties, d’abord des points particuliers qui peuvent influer sur leur compréhension, puis l’idée fondamentale. Je tâcherai ensuite de situer ce passage, de façon plus globale, dans la théologie de Paul.

B.1 : L’amour, la qualité essentielle de la vie chrétienne (v. 1-3)

Paul met en exergue dans ces versets 1-3 les dons spirituels les plus spectaculaires, puis il en relativise la valeur s’ils sont séparés de l’amour. Sans surprise, il commence par le problème le plus évident à Corinthe, le parler en langues.

Le plus étonnant pour nous est sans doute cette mention des « langues des anges », surtout quand on songe à certaines interprétations ou pratiques populaires. Dans quelques milieux chrétiens, ces langues sont fréquemment associées au « chant en langues » ou à une certaine glossolalie intraduisible. Au temps du Nouveau Testament, une idée bien précise s’y attachait. Dans le judaïsme de l’époque, on trouve en effet, assez couramment, l’idée qu’une des activités principales des anges qui forment la cour céleste est de rendre continuellement un culte à celui qui y siège9 ; or, ces êtres célestes auraient chacun leur propre langue, des langues qui existeraient donc essentiellement pour l’adoration. Un document retrouvé à Qumrân, intitulé « Chants pour le sacrifice du Sabbat », le montre clairement. Il s’agit d’une description, avec force détails, de ce qui se passe dans ce culte célébré par les anges. En voici un extrait, à titre d’exemple :

[Un psaume de louange élevée sera adressé dans la langue du] troisième grand prince, une louange en direction du Roi des anges élevés, sept fois, comportant sept paroles élevées et merveilleuses. Un psaume de louange sera adressé dans la langue du quatr[ième] au Guerrier qui est au-dessus de tous les dieux, comportant les sept merveilleuses expressions guerrières de sa langue. Puis il louera le Dieu de la puissance guerrière sept fois avec se[pt] paroles de [merveilleuse] louange10.

Mais alors que suggère Paul en parlant, en 1 Corinthiens 13, des « langues des anges » ? Si l’on avait, dit-il, la capacité de comprendre et de parler, non seulement toutes les langues humaines, mais encore celles dont les anges eux-mêmes se servent pour adorer Dieu dans le ciel… mais sans amour, ce ne serait qu’un son creux, un tintamarre qui « agresse les oreilles ». Soyons clairs : un tel don va infiniment au-delà de ce qui se vivait concrètement, que ce soit à Corinthe ou dans n’importe quelle autre communauté chrétienne. Paul verse ici dans l’hyperbole et ne décrit pas ce qui se pratiquait dans l’Église !11 Pourtant, s’il était possible de posséder et utiliser même ce don-là, mais de façon non à édifier l’Église, mais à s’élever par-dessus les autres, cela serait dénué de toute valeur spirituelle12. Les conclusions qu’il faut en tirer pour le culte à Corinthe – bien en dessous d’une telle pratique hypothétique – se devinent sans difficulté.

Relevons un deuxième point dans ces versets. Paul poursuit son enseignement en mettant en avant trois autres illustrations de ce qui pouvait passer pour une « spiritualité supérieure ». Il faut relever, d’ailleurs, la répétition de l’adjectif « tout » : « tous les mystères », « toute la connaissance », « toute la foi ». C’est la pleine mesure de ces dons qui est envisagée… mais, une fois de plus, sans l’amour13. Peut-on préciser davantage le propos ? Dans un livre paru il y a quelques années déjà, l’exégète britannique D. Wenham fait remarquer que l’apôtre reprend probablement ici l’enseignement de Jésus lui-même :

  • La connaissance des mystères rappelle la parole de Jésus au sujet des « mystères du royaume de Dieu » qu’il est donné aux douze disciples de connaître (Mt 13.11).

  • La foi qui transporte les montagnes s’inspire de l’enseignement de Jésus que l’on retrouve en Mc 11.23.

  • L’idée de donner toutes ses possessions aux pauvres semble faire allusion à la parole adressée au jeune homme riche dans les évangiles : « vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres » (Mt 19.21)14.

Ces rapprochements avec l’enseignement de Jésus ne sont sûrement pas une coïncidence. Paul laisse entendre, au contraire, un message précis : quand bien même on serait le disciple idéal, tel que Jésus lui-même le définit, doté des qualités qui siéent à ceux qui se mettent à la suite du maître… sauf l’amour, il n’en reviendrait aucun profit. Au-delà des « dons spirituels » ou des charismata, et même d’une certaine façon indépendamment d’eux, ce qui fait le chrétien, c’est l’amour. Autant dire que l’amour est l’ingrédient essentiel de la vie chrétienne. Il ne serait sans doute pas exagéré – même si cela nous obligeait à refaire notre théologie totalement ou en partie – de dire que, sans l’amour, on n’est pas chrétien, on n’est pas disciple de Jésus-Christ, quelles qu’en soient les apparences15.

Relevons en passant la finesse psychologique et pédagogique de ces lignes : Paul serait évidemment en droit d’adresser les reproches les plus sévères à ses lecteurs. La situation l’aurait largement mérité. Pourtant, il parle ici à la première personne du singulier : « Quand je parlerais… quand j’aurais…, quand je distribuerais. » L’apôtre dit ce que les Corinthiens doivent entendre mais il le dit, à la fois, en évitant la confrontation directe et de façon à ce que chacun, en lisant ou entendant pour lui-même ces « je », soit amené à s’approprier ce qui y est dit.

B.2 : Les aspects concrets de l’amour (v. 4-7)

Dans cette deuxième section du chapitre, relevons surtout trois détails parmi l’abondance d’éléments que Paul y développe.

a) D’abord l’expression, au verset 5 : « [L’amour] ne médite pas le mal » (Colombe)16. S’agit-il simplement de dire que l’amour ne cherche pas à faire du tort à autrui ? L’affirmation serait bien entendu vraie, mais c’est d’une telle évidence que cela équivaut presque à une lapalissade. Les lexiques suggèrent toutefois qu’il y a plus. Le verbe ici (logizomai) signifie entre autres « compter », « comptabiliser », en sorte que l’on peut comprendre : l’amour « ne comptabilise pas le mal ». Il ne tient pas une liste des torts qu’il a subis de la part de l’autre. La TOB paraphrase légèrement le sens, en traduisant : « il n’entretient pas de rancune »17. L’exégète catholique C. Spicq explique ainsi l’expression : « C’est plus que l’absence de rancune et même que le pardon, c’est l’oubli, comme si l’on effaçait sur la tablette de cire les traits gravés par le stylet incisif ! Quand il s’agit du mal, quel qu’il soit […], torts ou erreurs d’autrui, la charité n’a pas de mémoire […]. »18

b) Le deuxième point pose un problème plus important. Au verset 7, Paul dit, d’après une version bien connue, que l’amour « […] pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout »19. Cela implique-t-il que par amour pour quelqu’un, il faut entretenir une crédulité naïve, même lorsque le comportement de la personne suggère le contraire ? Ou encore, que le devoir chrétien implique que nous supportions, patiemment, même les pires outrages que quelqu’un puisse déverser sur nous – puisqu’on doit « tout supporter » ? Là encore, il faut prêter attention à ce que Paul dit vraiment. Comme plusieurs l’ont fait remarquer, le terme pour « tout » peut bien se traduire comme un complément d’objet direct (« l’amour croit toutes choses ») mais aussi comme un adverbe de temps, c’est-à-dire « toujours »20 : ainsi, l’amour « […] couvre toujours21, il croit toujours, il espère toujours, il supporte toujours ». En d’autres termes, l’amour est toujours prêt à accorder une nouvelle chance ; il n’enferme pas l’autre dans son péché ou dans un comportement où les améliorations sont d’avance proscrites. Il est toujours prêt à croire qu’un changement est possible, même s’il s’agit d’un énième recommencement. Tout en restant réaliste, l’amour est animé par ce souci constant du bien de l’autre, comme aussi de la conviction que celui ou celle qui est frère ou sœur en Christ ne sera pas demain ce qu’il est aujourd’hui. C’est d’ailleurs pourquoi Paul poursuit en soulignant que l’amour « ne succombe – littéralement, ‹ne tombe› – jamais » (v. 8). Comme G. Fee le précise encore : « Paul ne veut pas dire que l’amour a toujours la pensée la plus positive que l’on puisse avoir sur tout et sur tout le monde, mais que l’amour ne cesse jamais de croire ; il ne perd jamais l’espoir. C’est pour cela qu’il peut persévérer. »22

c) Puis, troisièmement, relevons en passant – j’y reviendrai plus loin – les liens entre ces caractéristiques de l’amour et le fruit de l’Esprit en Galates 5.22-23. Non seulement c’est par l’amour que débute la description de ce fruit en Galates, mais encore les deux premiers « traits de caractère » de l’amour s’y retrouvent aussi :

  • 1Co 13.4 : « L’amour est patient (makrothumei), il est plein de sollicitude (chrêsteuetai). »

  • Ga 5.22 : « Le fruit de l’Esprit, c’est l’amour, la paix, la patience (makrothumia), la sollicitude (chrêstotês). »

Ces points ne figurent pas dans l’un et l’autre texte par hasard. Plus qu’une simple énumération d’attitudes ou de comportements isolés, Paul décrit l’amour, dans les deux passages, comme une réalité à multiples facettes mais qui sont toutes la conséquence de l’œuvre de l’Esprit.

Cette dernière remarque nous aide à mieux saisir l’unité de cette section. Au-delà des différents détails, ce qui est central est le souci de l’autre. Paul le dit explicitement au verset 5 : l’amour, affirme-t-il, « ne cherche pas son propre intérêt (ou zêtei ta heautês) ». En réalité, toute la perspective des versets 4-7 va dans ce sens : l’amour renonce aux attitudes qui nous encourageraient à braquer les regards sur nous-mêmes, à cultiver l’impatience vis-à-vis de l’autre. Il se soucie, en tout premier lieu, du bien du frère ou de la sœur en Christ ; il cherche à pallier ses manquements, à le supporter dans ses lenteurs.

Est-il besoin de préciser que, compris de cette façon, l’amour n’a pas grand-chose à voir avec le sentiment auquel on prête habituellement ce nom dans notre société actuelle ? L’amour qui s’en vient et s’en va à l’improviste, qui ne perdure pas plus longtemps que les émotions qui le portent, et qu’on ne peut pas « forcer » ou « mettre en cage » ! À l’inverse d’une telle chimère, Paul présente l’amour, non comme une idée ou un sentiment, mais comme un comportement23. En tenant compte du contexte de l’Église de Corinthe, il conviendrait peut-être aussi de souligner que cette agapè n’est pas non plus le strict équivalent de la « convivialité » qui peut exister au sein de la communauté chrétienne. En effet, cette convivialité-là se limite bien souvent à ceux qui pensent comme nous, qui partagent nos idées, qui nous ressemblent. L’amour dont Paul se fait ici le chantre se construit là, précisément, où les « atomes crochus » sont absents, là où l’attachement doit se faire, non sur une base de « convivialité » mais de « support mutuel »24.

B.3 : La permanence de l’amour (v. 8-12)

Si les versets 1-7 montrent la nécessité et les contours précis de l’amour, les versets 8-12 soulignent sa permanence. Notons qu’il existe au sujet des versets 8-10 tout un débat au sujet de la durée des dons de prophétie et de langues : ce que Paul dit ici n’implique-t-il pas que l’un et l’autre devront perdurer aussi longtemps que notre connaissance sera partielle, autrement dit jusqu’au retour du Christ ? À notre avis, chercher à tirer de ces versets des conclusions sur ce sujet – dans un sens ou dans un autre – serait imposer à Paul un débat qui ne le préoccupait pas. Son propos est plus large et, en même temps, bien plus concret : les messages donnés par l’inspiration directe de l’Esprit – que ce soit de manière compréhensible ou sous une forme devant être traduite – mais aussi toute révélation donnée dans le contexte de l’histoire présente, et même toute notre connaissance de chrétiens, tout cela est destiné à être dépassé par la réalité eschatologique, dans le royaume éternel. Toute révélation que Dieu nous confie est véridique. Mais elle est aussi partielle et devra céder devant la plénitude de la connaissance de Dieu dans l’eschaton, dans la situation finale.

Il y a un jeu de mots intéressant dans ces versets, car le terme teleios (« perfection ») au verset 10 s’emploie aussi pour désigner l’âge adulte25. C’est d’ailleurs ce qui facilite la transition, aux versets 11-12, vers l’évocation du contraste entre une pensée enfantine et une réflexion adulte. Les différentes formes de révélation présente sont encore dans l’attente de la plénitude. D’où la nécessité à ne pas y accorder une importance démesurée : ce sont des aides pour le voyage. Mais leur existence même rappelle que nous ne sommes pas encore parvenus à destination. Ou, pour reprendre la métaphore paulinienne, une telle révélation reste en rapport avec le temps de l’enfance. Elle est nécessaire, mais seulement parce que nous ne sommes pas encore adultes.

Au verset 12, Paul fait encore une comparaison entre notre vision actuelle de Dieu et notre contemplation « au moyen d’un miroir ». L’idée parfois avancée est celle d’un manque de clarté : les miroirs de l’Antiquité, en métal poli, ne permettait pas, dit-on, une image nette. Nous percevrions donc la réalité divine, mais obscurément, de façon confuse26. Les commentateurs plus récents penchent plutôt en faveur de l’idée d’une connaissance médiate : la métaphore ne concernerait pas tant une perception trouble qu’une vision indirecte27. Dans le temps présent, notre connaissance de Dieu nous vient par une parole ou par une représentation mentale. Elle s’adresse à notre intelligence et non à notre vision. Si elle touche à des réalités eschatologiques, elle reste néanmoins « pénultième » : elle appartient à la situation « avant-dernière ». Elle se distingue donc de ce jour où nous verrons « face à face » (v. 12). C’est toute la différence, nous dit Paul, entre jouir d’une connaissance partielle et connaître « comme nous avons été connus », c’est-à-dire à fond, intimement, et de façon im-médiate.

C. L’amour, obligation et don de Dieu

1 Corinthiens 13 est, sans conteste, un des plus beaux passages de l’Écriture, peut-être même de la littérature humaine, si l’esthétique se définit, ne serait-ce qu’en partie, par la capacité à éveiller les aspirations les plus profondes de l’être humain28. Mais c’est aussi un texte redoutable : qui prétendrait vivre, réellement, la description de l’amour que Paul nous y livre, aux versets 4-7 en particulier ?

De fait, ce texte risquerait d’être écrasant si l’apôtre ne nous donnait ailleurs des clés pour comprendre dans quel contexte nous devons le lire. Le terme agapè, qui y revient neuf fois, est important pour Paul, puisque nous ne le trouvons pas moins de soixante-six fois ailleurs dans ses épîtres. Le verbe agapaô y figure, quant à lui, trente-quatre fois. Or, il importe surtout de noter les passages où cet amour est mis en rapport avec Dieu. Dans une quinzaine de textes en tout cas, Paul développe l’amour en rapport explicite, soit avec Dieu, soit avec le Christ, soit avec l’Esprit. L’amour de Dieu en Christ est ce dont personne ni rien ne pourra nous séparer (Rm 8.35, 39). C’est l’amour du Christ qui « étreint » (ou « presse ») l’apôtre, et qui l’amène à poser un regard nouveau sur le monde et sur les autres (2Co 5.14). Dans l’épître aux Éphésiens, cet amour qui « dépasse toute connaissance » est – paradoxalement – ce que les lecteurs sont appelés à connaître, ce dont ils doivent découvrir « la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur » (Ep 3.19)29. C’est de cet amour que le Fils de Dieu nous a aimés, dit-il encore en Galates 2.20, en se donnant pour nous à la croix30. Qui plus est, ce même amour, « Dieu l’a versé dans nos cœurs par l’Esprit qu’il nous a donné » (Rm 5.5). C’est pourquoi, comme nous l’avons vu, cette agapè fait partie du fruit que l’Esprit produit dans la vie des croyants et en constitue même la première manifestation (Ga 5.22). De ce fait, Paul peut demander que Dieu dirige le cœur de ses lecteurs vers l’amour (2Th 3.5), et que cet amour leur soit donné (2Co 13.13 ; Ep 6.23)31. Fondamentalement, l’amour n’est donc pas quelque chose que les chrétiens doivent créer de leur « propre fonds » ; c’est un don que l’on revêt (Col 3.14), comme on revêt le Christ lui-même32. On comprend désormais que C. Spicq ait pu écrire que l’agapè fonctionne chez Paul comme un « […] terme technique de la langue de la nouvelle alliance »33. Ch.K. Barrett, de son côté, relève le lien entre l’amour auquel l’apôtre appelle ses lecteurs et l’amour de Dieu qui s’est manifesté en Christ :

[…] A mesure que la description paulinienne de l’amour s’élabore, il devient évident, non seulement que le seul modèle humain dont [Paul] ait pu se servir est Jésus de Nazareth, mais qu’il s’agit en réalité d’une description de l’amour de Dieu, le seul être qui aime spontanément et sans motivation extérieure34.

Aussi, si l’amour est une exigence posée à la communauté chrétienne et à chacun de ses membres, il n’en demeure pas moins un don. Et puisque sa réalité nous a été révélée en Christ, c’est à ce dernier qu’il faut regarder ; pour en comprendre les « contours », bien sûr, mais aussi pour trouver la motivation nécessaire à sa mise en pratique. Comme le dit l’apôtre en Éphésiens 5.2 : « Marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés (kathôs kai ho Christos êgapêsen êmas) et s’est livré lui-même à Dieu. »35 L’amour du Christ fournit l’injonction d’aimer et, en même temps, l’impulsion, l’exemple pratique que les croyants doivent reprendre à leur compte36. Et du fait qu’il s’agit d’un don, cet amour, finalement, revêt aussi les caractéristiques d’une promesse : l’amour est ce dont Dieu nous a comblés. C’est encore ce qu’il s’engage à accomplir en nous, pleinement, au retour du Christ et dans le royaume éternel. Cette précision conduit à un dernier point.

D. La réalité eschatologique de l’amour

Au verset 13, Paul fait l’affirmation suivante : « Maintenant demeurent la foi, l’espérance, l’amour, ces trois choses. » D’une certaine façon, les trois « vertus théologales » ont une permanence que n’ont pas le parler en langues, la prophétie, la connaissance, notamment. Pourquoi ? Parce qu’elles nous « relient », bien plus directement que les dons, au monde divin. Au sens le plus profond, la foi c’est se tourner vers Dieu lui-même et s’y attacher. Il y a, dans la foi, un aspect personnel et relationnel qui n’est pas nécessairement présent dans les charismata, même bien compris. De même, l’espérance, c’est s’attendre à Dieu, à ce qu’il va faire, à ses promesses. Dans l’une comme dans l’autre, le regard est porté au-delà des dons vers celui qui donne. C’est très certainement pour cela que, même en dehors de 1 Corinthiens 13, la foi, l’espérance et l’amour sont mis en évidence comme les traits caractéristiques, les ingrédients essentiels de la vie chrétienne37.

Pourtant, Paul poursuit en précisant que « le plus grand de ces trois, c’est l’amour ». Qu’est-ce qui fait que l’amour reçoit un statut plus particulier encore que les deux autres ? C’est très certainement parce que, malgré une certaine imprécision dans le langage, Paul veut faire comprendre que seul l’amour est appelé à durer éternellement38. L’apôtre le montre ailleurs : la foi et l’espérance disparaîtront un jour. Non pas qu’elles soient condamnées à être déçues mais, comme le souligne 2 Corinthiens 5, nous marchons à présent « par la foi et non par la vue » (2Co 5.7). En Romains 8, Paul affirme encore : « Car c’est en espérance que nous avons été sauvés. Mais une espérance que l’on voit n’est pas espérance ; en effet, ce qu’on voit, qui l’espère encore (ho gar blepei, tis elpizei) ? »39 Au retour du Christ, la foi cédera devant la vue, l’espérance devant la possession des biens promis. L’amour, lui, est différent. Il est ce qui existera de façon permanente entre Dieu et son peuple, jusque dans le royaume éternel. La foi et l’espérance sont donc les « bâtons du pèlerin », nécessaires aussi longtemps que ce dernier est en chemin. L’amour, lui, est la destination, le but du voyage40.

Mais cela veut dire aussi que l’amour est l’élément de la vie chrétienne qui – seul – nous met en rapport, dès à présent, avec la réalité eschatologique dans son plein accomplissement. La foi et l’espérance sont nécessaires précisément parce que nous sommes encore en chemin. Elles permettent aux « yeux du cœur » de se fixer sur ce que nous n’avons pas encore obtenu. L’amour, lui, nous fait toucher du doigt la réalité même du royaume éternel. Plus encore qu’un avant-goût, il en est les prémices. En aimant en vérité, nous participons, dès à présent, à ce que nous vivrons dans l’éternité41.

Conclusion

Nous vivons, aujourd’hui, dans une société qui tourne, essentiellement, autour de l’épanouissement personnel et des « droits de l’individu ». Les événements tragiques du 11 janvier 2015, mais aussi la revendication, par la suite, de la « liberté d’expression » – liberté dont on doit pouvoir jouir à tout prix, quitte à insulter, à blesser ou à offenser l’autre – montrent les limites d’une telle vision des choses. En tant que chrétiens, nous pouvons déplorer une telle situation. Mais comment réagir concrètement ? C’est peut-être ici que 1 Corinthiens 13 trouve sa plus grande pertinence.

Dire à nos contemporains qu’ils doivent aimer, c’est tomber d’emblée dans des vœux pieux et, à n’en pas douter, stériles. En revanche, être une communauté où l’on s’aime réellement montrera, bien que modestement et imparfaitement, une alternative, et même la seule alternative valable pour une société qui dit rechercher le bien d’autrui. Plus encore, une telle communauté montrera – avec des paroles qui expliqueront, mais surtout au-delà des paroles, par ses actes – quelle est la source de cet amour, d’un amour qui n’a pas son origine dans des êtres humains, dans leurs aspirations ou leurs idéaux, mais dans le Dieu qui a prouvé son amour pour nous à la croix. Tout en restant conscients de nos faiblesses et de nos imperfections, osons formuler cette prière pour l’Église du xxie siècle : que le Dieu d’amour donne à son peuple, placé au cœur du monde, d’être rempli de son amour afin que nos contemporains perçoivent quelle en est la source, qui est aussi l’objet de notre foi et de notre espérance.

1 Corinthiens 13
Traduction de l’auteur

1 Si je parlais les langues des hommes, et même celles des anges, mais que je n’aie pas l’amour, je ne suis que du métal bruyant ou une cymbale qui agresse les oreilles. 2 Si je possédais le don de prophétie, si je connaissais les mystères – tous ! – et si j’avais toute la connaissance ; ou encore, si j’avais toute la foi, en sorte que je puisse déplacer des montagnes, mais que je n’aie pas l’amour, je ne suis rien. 3 Si je donnais par petits morceaux tous mes biens et si je livrais mon corps, en sorte que je puisse en tirer fierté, mais que je n’aie pas l’amour, cela ne m’est d’aucun profit.

4 L’amour est patient, l’amour agit avec bonté, il ne jalouse pas ; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, 5 il n’agit pas de façon inconvenante ; il ne cherche pas son propre intérêt, il ne s’irrite pas, il ne comptabilise pas le mal. 6 Il ne se réjouit pas de l’injustice mais il se réjouit, avec les autres, de la vérité ; 7 il couvre toujours les faiblesses des autres, il croit toujours, il espère toujours, il persévère toujours.

8 L’amour ne tombe jamais. Mais les prophéties ? Elles seront abolies. Les langues ? Elles cesseront. La connaissance ? Elle prendra fin. 9 Car c’est partiellement que nous connaissons, partiellement que nous prophétisons. 10 Mais lorsque la perfection sera arrivée, ce qui est partiel sera mis de côté. 11 Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, j’avais des réflexions d’enfant, je considérais les choses comme le fait un enfant. Quand je suis devenu adulte, j’ai mis de côté les choses qui appartiennent à l’enfance. 12 En effet, nous voyons à présent au moyen d’un miroir, de façon indirecte ; mais alors, ce sera face à face. À présent, je connais partiellement ; mais alors, je connaîtrai parfaitement – comme j’ai aussi été connu.

13 Maintenant demeurent la foi, l’espérance, l’amour, ces trois choses. Mais la plus grande d’entre elles, c’est l’amour.


  1. Voir la traduction de l’auteur en annexe de cet article.

  2. Donald Cobb est professeur de grec et de Nouveau Testament à la Faculté Jean Calvin d’Aix-en-Provence.

  3. Ainsi, par exemple, Ch.K. Barrett, A Commentary on the First Epistle to the Corinthians, Londres, A & C. Black, 19712, p. 299, et G. Deluz, La sagesse de Dieu. Explication de 1 Corinthiens, Neuchâtel-Paris, Delachaux et Niestlé, 1959, p. 209.

  4. En 1 Corinthiens 14.1, c’est le terme pneumatika qui est utilisé, mais on trouve aussi, plusieurs fois dans la lettre, celui de charismata. Deux remarques au sujet de ce second terme : d’une part, en ce qui concerne son utilisation, Paul la limite, dans ces chapitres, essentiellement à la guérison (1Co 12.9, 28, 30). D’autre part, en dehors de cet usage spécifique, Paul considère les charismata dans un sens très large : l’ensemble des dons que Dieu confie à son Église (12.4), ce qui comprend aussi, par exemple, la direction de la communauté ou l’assistance à ceux qui sont dans le besoin (12.28 ; cf. aussi 1.7 ; 7.7 ; Rm 12.6). Malgré une habitude bien ancrée dans les esprits, employer l’expression de « dons charismatiques » pour parler, de façon précise, du parler en langues ou de la prophétie n’est donc pas vraiment conforme à ce que l’apôtre dit dans ces chapitres.

  5. Cf. surtout 1Co 14.2-19.

  6. Cf. 1Co 12.14-26.

  7. Sur la visée et la stratégie rhétoriques de ce chapitre, voir les remarques de B. Witherington III, Conflict and Community in Corinth. A Socio-Rhetorical Commentary on 1 and 2 Corinthians, Grand Rapids-Cambridge, Eerdmans, 1995, p. 264-265.

  8. Bien relevé par B. Witherington III, Conflict and Community, p. 264, n. 4. Comme le souligne encore M. Bouttier, La condition chrétienne selon saint Paul (coll. NST), Genève, Labor et Fides, 1964, p. 69, au sujet des dons : « Quelle que soit leur variété, parfois même leur mystère, ils ont un caractère commun, un même dénominateur qui les apparente et fait de chacun d’eux une grâce dont tous bénéficient – ce trait commun, cette composante, c’est l’amour. »

  9. L’image est présente dans le Nouveau Testament, dans le livre de l’Apocalypse (Ap 4.6-11 ; 5.11-12, etc.) et en Hé 12.22-23.

  10. 4Q404, fr. 1, col. 1. Traduction reprise et adaptée de M.O. Wise, M. Abegg Jr. et E. Cook (dir.), Les manuscrits de la mer Morte, Paris, Editions Perrin, 20032, p. 471. Les mots entre crochets sont suppléés par les éditeurs lorsque le texte est fragmentaire ou endommagé. Cf. aussi Testament de Job, 48-50 (et, dans la littérature rabbinique, Exode Rabba 28 ; 88c ; Sota 33a).

  11. Calvin l’a bien perçu. J. Calvin, Commentaires de Jean Calvin sur le Nouveau Testament, t. 5.1, Première épître aux Corinthiens, Aix-en-Provence/Marne-la-Vallée, Kerygma/Farel, 1996, p. 219 (l’édition originale date de 1546).

  12. Il est possible, en revanche, que les membres de l’Église de Corinthe, qui semblaient convaincus de vivre une sorte d’existence eschatologique anticipée et « quasi angélique », aient interprété la glossolalie qui se pratiquait en leur sein comme une forme de langage des anges. Ainsi G. Fee, The First Epistle to the Corinthians (coll. NICNT), Grand Rapids, Eerdmans, 1987, p. 631.

  13. G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 632.

  14. D. Wenham, Paul Follower of Jesus or Founder of Christianity ?, Grand Rapids, Eerdmans, 1995, p. 81-85.

  15. Comme le dit M. Bouttier, La condition chrétienne selon saint Paul, p. 69, sans l’amour, « […] tous les charismes se dissolvent ; ils se trouvent comme réduits à l’état païen » (italiques dans le texte). Il convient de dire un mot au sujet de l’expression « Si je livrais mon corps de sorte que je puisse en tirer fierté », au v. 3. La plupart des versions modernes ont traduit : « Quand je livrerais même mon corps pour être brûlé » (BC, BJ, TOB, BFC, etc.). Cf. aussi C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, Paris, Lecoffre-Gabalda, 19663, p. 56-58. Notre traduction (cf. aussi la Nouvelle Bible Segond) repose sur une variante textuelle présente dans des manuscrits à la fois anciens et de bonne facture (P46, Sinaiticus, Alexandrinus, Vaticanus, 33, 1739*, etc.). Elle semble préférable comme leçon quelque peu heurtée et qui aurait facilement engendré des variantes destinées à rendre le texte plus « lisse » ou coulant. G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 634, n. 46, cite 1 Clément 55.2 comme confirmation de cette leçon. Significativement, ce dernier passage utilise – sans doute consciemment – le même langage que Paul en 1 Corinthiens 13 (paradidonai, « livrer », psômizein, « distribuer [ou donner à manger] par petits morceaux »), sans pourtant évoquer l’idée de « livrer aux flammes ». Cela suggère, estime Fee, que Clément, qui écrivait vers l’an 96 apr. J.-C., connaissait le texte de Paul mais non la variante qui se trouvera plus tard dans le texte majoritaire. Fee considère (ibid., p. 635) que Paul, dans ce verset, offre « une réflexion sur son propre ministère, se référant aux diverses sortes de souffrances corporelles dont il ‹se glorifie› en 2Co 11.23-29 et 12.10, et qui contribue également à fonder son ‹sujet de gloire›, plus encore que le salut de ses lecteurs. Cependant, s’il n’a pas aussi l’amour, même ces sujets de gloire, dit-il, ‹ne me profitent de rien›. »

  16. Ou logizetai to kakon.

  17. Cf. les articles pour ce vocable in J.P. Louw and E.A. Nida (éd.), Greek-English Lexicon of the New Testament Based on Semantic Domains, New York, United Bible Societies, 1988-1989, et F.W. Danker, A Greek-English Lexicon of the New Testament and other Early Christian Literature, Chicago, University of Chicago Press, 20003 (BDAG par la suite). Ce dernier cite notamment à l’appui l’écrit intertestamentaire Testament de Zabulon 9.7, qui donne la description suivante de l’intervention salvatrice de Dieu attendue pour la fin des temps : « Après cela, vous vous souviendrez du Seigneur, vous vous repentirez et il vous convertira, car il est fidèle et plein de compassion, ne tenant pas compte de la méchanceté des êtres humains (mê logizomenos tên kakian tois anthrôpôn). » Cf. aussi 2Co 5.19 : « Dieu était en Christ, […] ne tenant pas compte aux hommes de leurs fautes (mê logizomenos autois ta paraptômata autôn). »

  18. C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, p. 88-89.

  19. Suivant la version de Segond révisée dite « de la Colombe ».

  20. Ainsi, par exemple, G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 639-640.

  21. Panta stegei. L’idée ici est probablement « couvrir par le silence » : l’amour passe sous silence les faiblesses des autres. Il ne cherche pas à ébruiter les échecs d’autrui mais il protège l’autre en gardant le silence sur des défauts, etc., qui pourraient mettre l’autre dans une lumière défavorable. Cf., par exemple, Ch.K. Barrett, A Commentary on the First Epistle to the Corinthians, p. 304, et C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, p. 91-92.

  22. G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 640. Cf. aussi Ch.K. Barrett, A Commentary on the First Epistle to the Corinthians, p. 305, et d’autres.

  23. Comme le dit encore G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 628 : « Aimer, c’est agir ; tout ce qui s’arrête en deçà des actes n’est pas l’amour du tout. »

  24. Cf., sur cette dernière notion, Rm 14.1 ; 15.1 ; Ga 6.2 ; Ep 4.2, 32 ; 5.1-2 ; Col 3.13 ; 1Th 5.14.

  25. Cf., par exemple, BDAG, et C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, p. 94.

  26. Ainsi, par exemple, F.W. Grosheide, Commentary on the First Epistle to the Corinthians (coll. NICNT), Grand Rapids, Eerdmans, 1953, p. 311.

  27. Cf., par exemple, G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 647-648, et C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, p. 95-100. Ce dernier souligne que « les anciens vantaient la pureté et la clarté de leurs miroirs, dont ils trouvaient la surface nette et sans défauts » ; ibid., p. 95 (avec références à Platon, Philon d’Alexandrie, Plutarque, et Sagesse de Salomon 7.26).

  28. C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 2, p. 60-63, fait une comparaison intéressante avec d’autres textes, juifs et hellénistiques, de l’Antiquité. Il écarte, à juste titre, l’idée d’un emprunt direct, Paul s’appuyant sur tel ou tel texte précis, tout en montrant que la littérature grecque contient maints exemples de mises en avant de diverses vertus. D’après Spicq (ibid., p. 63), « […] il est assuré que saint Paul, pour mettre en valeur l’excellence de la charité, s’est conformé à l’usage de la rhétorique classique, rédigeant sa composition sur le type traditionnel des éloges de vertus ».

  29. Cf. aussi Ph 2.1 ; 1Th 1.4 ; 2Th 2.13.

  30. Rm 15.30 pourrait même suggérer que l’amour de Dieu résume tout le contenu de l’épître aux Romains.

  31. Cf. aussi 1Th 3.12.

  32. Cf. Rm 13.14 ; Ga 3.27 ; Col 3.10.

  33. C. Spicq, Agapè dans le Nouveau Testament. Analyse des textes, t. 1, Paris, Lecoffre-Gabalda, 19663, p. 208.

  34. Ch.K. Barrett, A Commentary on the First Epistle to the Corinthians, p. 310.

  35. Traduction personnelle.

  36. Ici comme ailleurs chez Paul, l’impératif – ce que nous sommes appelés à faire – découle de l’indicatif : ce que Dieu a fait pour nous et ce que nous sommes devenus dans notre appartenance au Christ.

  37. Cf. Rm 5.2-5 ; Ga 5.5-6 ; Col 1.4-5 ; 1Th 1.3 ; 5.8. Cf. aussi Rm 15.13 ; Col 1.23.

  38. À strictement parler, du fait que les trois vertus « demeurent », il serait possible de comprendre que Paul prête aussi bien à la foi qu’à l’espérance et à l’amour un aspect permanent, et ce jusque dans l’éternité. Ce serait donc par rapport à l’ensemble des « vertus théologales » que Paul établirait le contraste avec ce qui est passager et appelé à disparaître (v. 8-12). C’est ainsi que le comprend Ch.K. Barrett, A Commentary on the First Epistle to the Corinthians, p. 308, et une minorité de commentateurs. À notre sens, une telle interprétation sollicite trop le langage du passage, qui n’a pas la rigueur d’un exposé systématique. Cela dit, il est également possible que le « maintenant » du v. 13 ait une valeur temporelle, et non de conséquence seulement : « Or, à présent, ces trois choses demeurent ». Ainsi, par exemple, G. Fee, The First Epistle to the Corinthians, p. 649-650, et B. Witherington III, Conflict and Community, p. 271-272.

  39. Notre traduction.

  40. Cf. aussi M. Bouttier, La condition chrétienne selon saint Paul, p. 69.

  41. Cf. M. Bouttier, La condition chrétienne selon saint Paul, p. 68. K. Barth, Dogmatique, 4,2 ***, Genève, Labor et Fides, 1971, p. 247, paraphrasant E. Troeltsch, disait que l’amour « […] est la force de l’au-delà qui est déjà en soi la force de l’en deçà ».

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