La faculté libre de théologie réformée – Rétrospective et prospective

La faculté libre de théologie réformée
Rétrospective et prospective

Pierre BERTHOUD*

Introduction: un peu d’histoire

i) Conception et gestation de la faculté

Née en 1974, la conception de la faculté est bien antérieure et sa gestation s’étend sur plusieurs années, de 1962 (1967)1 à 1974; période pendant laquelle se sont mises en place deux idées essentielles:

– celle d’une faculté de théologie autonome/libre de toute union d’Eglises;

– celle d’une faculté de théologie chrétienne, résolument réformée, dont la base doctrinale était la Confession de foi de La Rochelle (et la Déclaration de foi de l’Alliance évangélique française). Cette identité se retrouve dans le nom que le conseil de faculté lui a donné: Faculté libre de théologie réformée (FLTR).

ii) La FLTR, si elle est tributaire de l’ancienne Faculté de théologie protestante (FTP), est cependant une institution nouvelle.

a) Elle est tributaire puisqu’elle a hérité de ce qui restait de la bibliothèque et du statut administratif accordé par le rectorat à l’ancienne FTP. Les EREI2 ont également mis gracieusement à la disposition de la FLTR les locaux et jardins qu’elle occupe actuellement.

b) C’est une institution nouvelle puisqu’elle est libre par rapport à toute union d’Eglises – c’est le conseil de faculté qui définit la politique générale de la faculté – et qu’elle a adopté une identité théologique spécifiquement réformée: les professeurs adhèrent à la Confession de foi de La Rochelle.

Pour résumer ces quelques remarques introductives, nous pouvons dire avec P. Courthial que

ce sera de la part des EREI une preuve de désintéressement, de foi et de sain réalisme que d’accepter finalement l’autonomie de la future faculté réformée, tout en la laissant disposer, gratuitement, des lieux dont « l’Association cultuelle pour l’entretien de la faculté » (association faisant partie des EREI) était propriétaire3.

A) Vision et développement

• C’est alors que les Eglises historiques traversent une crise profonde que la Faculté libre de théologie réformée a été inaugurée le 14 octobre 1974. Sur le plan théologique, la diversité des courants, des écoles est telle que la vérité de l’Evangile est contestée et parfois même remplacée par des discours qui s’inspirent des modes de pensées qui doivent l’essentiel de leur contenu à l’humanisme ambiant.

Perçue par les uns comme un signe d’espérance, de renouveau, et par d’autres comme un signe de division, la faculté peut être comprise comme une manière d’incarner l’unité, une des préoccupations majeures des Eglises chrétiennes en ce siècle. Dans la prière sacerdotale, le Seigneur prie pour ses disciples afin qu’ils soient un comme le Père et le Fils sont un. Cette unité se tisse dans la communion avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Elle ne se fait pas au détriment de la vérité. La vérité, la parole de vérité du Seigneur, en accomplissant son œuvre de sanctification dans la communauté des croyants, produit le fruit de l’unité. Cette mise en œuvre de l’unité se distingue de certaines démarches contemporaines de nature institutionnelle ou consensuelle. La faculté, en mettant l’accent sur la Confession de foi de La Rochelle, a voulu souligner l’importance de l’unité qui tire toute sa substance de la vérité révélée. Dans la mise en œuvre de son projet de formation théologique et pastorale, elle se présente comme un signe d’une unité vécue à l’intérieur même du protestantisme, en particulier réformé. Comme le dit Pierre Courthial:

C’est la prise de conscience de l’antithèse entre la Confession de la foi et le dogme pluraliste qui a conduit les réformés confessants des Eglises réformées et réformées évangéliques à imaginer, puis à établir, la Faculté de théologie réformée d’Aix-en-Provence, d’abord pour glorifier le Dieu trinitaire en suivant Sa Parole, ensuite pour travailler au progrès de la foi réformée, en particulier dans les pays francophones, enfin pour préparer des pasteurs et, s’ils le veulent, des fidèles, joyeux dans la liberté de confesser « la foi transmise aux saints une fois pour toutes ».

A vue humaine, la création de la faculté était une folie. Elle répondait cependant à un besoin. L’élan et l’enthousiasme qu’elle a suscités a surpris et réjoui beaucoup de pasteurs et de fidèles. Elle en a heurté d’autres par le jugement qu’elle portait en elle et provoqué même incompréhension et réprobation. Cela n’aurait guère été possible autrement. Une institution de formation pastorale surgissait dans le paysage du protestantisme français dont l’identité confessionnelle et théologique était soit ignorée, soit systématiquement écartée!

• Quoi qu’il en soit, la Faculté d’Aix-en-Provence fut d’emblée crédible. Les trois professeurs formant alors le conseil des professeurs: Pierre Courthial, Peter Jones et Paul Wells étaient secondés par des professeurs associés de qualité et souvent connus au-delà des cercles protestants. Je pense à Frank Michaeli (Ancien Testament), Olivier Prunet (patristique), J.-M. Hornus (histoire des religions), à E. Boyer (évangélisation), F. Gonin et P. Chaunu (histoire), J. Brun (philosophie), sans oublier P. Marcel, A. Kayayan et D. Beaune-Gray. Chacun a porté sa pierre à l’édifice et contribué à la réussite de ce projet insensé et pourtant habité par une étincelle de sagesse divine. Je voudrais évoquer la mémoire de ceux qui ont déjà rejoint la maison du Père et remercier les autres.

• Il y a aussi les étudiants. Quatorze la première année, tous issus d’Eglises réformées. C’était la confirmation de la pertinence de l’analyse de la conjoncture et de la mise en œuvre du projet.

• Enfin, il y eut la réponse du peuple des Eglises, qui s’est reconnu dans l’identité confessante de la faculté et qui se rallia à son projet de former des pasteurs évangéliques. Sans la prière et le soutien des fidèles des paroisses essentiellement réformées, la faculté n’aurait jamais pu accomplir son ministère. Je pense en particulier à M. Silhol, président de l’association des amis de Paris, au pasteur Barilier de Lausanne (association des amis suisses), au professeur Dengerink (IARFA), au Dr Kolijn (Vrienden van Aix) des Pays-Bas et à Ed. Clowney, des Etats-Unis (Huguenot Fellowship), qui, dès la première heure, offrirent généreusement leur aide et soutien.

• La faculté devait se développer rapidement. De nouveaux professeurs rejoignirent l’équipe sur place, P. Berthoud, J.-M. Daumas, W. Edgar, Gérald et Eleanor Boyer. Puis il y eut, comme il se doit, des départs: P. Courthial, P. Jones, les Boyer et W. Edgar, qui furent suivis par l’arrivée du professeur A.-G. Martin, Ch. Rouvière et J.-C. Thienpont. Après le départ successif de ces trois derniers, l’équipe devait à nouveau s’étoffer avec la venue de M. Johner, H. Lea (chargé de cours) et Gordon Campbell. La bibliothécaire, A. Dieleman, devait s’intégrer à l’équipe à partir de 1980. Sur le plan administratif, Mlle de Védrines assuma les fonctions de secrétaire académique à partir de 1981 et Anthony Lewin devait occuper le poste de secrétaire général, nouvellement créé en 1994. Quant aux amis de la faculté, ils se développèrent surtout à l’étranger: aux Etats-Unis, les missions de la Presbyterian Church in America (MTW) et de la Christian Reformed Church (WM), aux Pays-Bas, l’association Kampen-Aix4 ainsi que plusieurs organisations ecclésiales qui manifestèrent un intérêt grandissant pour le ministère de la faculté5.

Enfin, l’Eglise presbytérienne en Irlande est le dernier de nos partenaires à nous avoir tendu la main d’association. Qu’il me soit permis d’exprimer auprès de toutes ces associations, Eglises et organisations missionnaires notre profonde reconnaissance pour l’intérêt et le soutien si évidents et fraternels qu’elles portent à la faculté et à sa mission.

B) Quelques chiffres

Afin de mieux visualiser le développement de la FLTR, voici quelques chiffres:

a) Budget 1975: 220 000 francs français; budget 1999: 3 200 000 francs (soutien France: 50%; soutien des amis étrangers: 50%). Pour 90% de son budget, la FLTR dépend de ses amis.

b) En 1974-1975: trois professeurs à plein temps; en 1999-2000: sept professeurs, un chargé de cours, une bibliothécaire, un secrétaire général et une secrétaire à plein temps, un comptable à mi-temps, sans compter les bénévoles.

c) En 1974-1975: 14 étudiants; en 1999-2000: 80 étudiants (un sommet en 1995-1996: 91).

d) Depuis 1974, la faculté a décerné quelque 306 diplômes (un même étudiant en ayant parfois reçu deux), dont 224 licences, 75 maîtrises et 7 doctorats; 180 étudiants exercent un ministère pastoral, dont une centaine dans les Eglises de la Fédération protestante de France (plus de 50 dans l’ERF, 35 EREI)6.

e) En 1974, l’action de la faculté était dirigée essentiellement en direction des Eglises réformées en France. Si on considère le paysage ecclésiastique, la faculté se situe à la croisée des chemins que représentent les Eglises historiques et « évangéliques ». Les premières sont multitudinistes et plutôt pluralistes, les secondes sont professantes et plus ou moins typées. C’est dans cet environnement ecclésial que la faculté exerce son ministère, tout en affirmant son identité résolument confessante. Si on considère le paysage géographique, il a incité la faculté à développer des relations avec les pays latins d’Europe et avec l’Afrique francophone. Des contacts ont aussi été établis avec des pays d’Europe de l’Est.

A titre indicatif, voici les effectifs de l’année 1999-2000: 80 étudiants sont régulièrement inscrits, dont 29 nouveaux, 34 célibataires, 46 mariés et 16 femmes7.

En résumé, la faculté a été amenée, tout au long de ces années, à préciser sa vocation. Aujourd’hui, plus que jamais, elle est appelée à être un lieu de passerelle, de ralliement, de réflexion, de prière et d’encouragement.

C) Une institution fragile

Comme une plante qui surgit de la terre, la faculté s’est levée, consolidée et développée. Elle fait partie du paysage protestant.

Cependant, elle demeure fragile:

• Elle est libre par rapport à l’Etat, mais aussi par rapport à toute union d’Eglises. Si cela lui permet d’être au service d’Eglises diverses, cela signifie aussi que personne ne lui doit rien. Le ralliement que la faculté peut susciter est l’expression d’un choix qui résulte d’une conviction acquise.

• Le courant théologique réformé confessant que la faculté représente et cherche à promouvoir est jeune. Il est encore peu connu et ses ressources sont faibles. Je pense à ses réseaux d’amis, en particulier en France, à son rayonnement dans les Eglises et à la relève de son personnel, plus précisément des professeurs. On ne s’improvise pas théologien. C’est une vocation, un apprentissage dont les fruits sont le produit d’une maturation que l’Esprit met en œuvre au sein de l’expérience humaine.

• Elle a aussi connu des épreuves, internes et externes. Si elles font partie de la vie quotidienne, il ne faut pas s’étonner de les rencontrer dans la vie de nos institutions. Comme le dit si bien Jacques, « l’épreuve de votre foi produit la patience ou la persévérance » (Jc 1:3), et Pierre nous rappelle que « le Seigneur sait délivrer de l’épreuve les hommes pieux » (2 P 2:9). C’est au sein des épreuves que se forge le caractère, que se confirme une vocation et que se consolide un ministère.

La FLTR a pu devenir prisonnière de ses habitudes; se laisser gagner par l’usure, perdre de sa pertinence en cessant d’être suffisamment attentive à son environnement ecclésial et culturel ou en se laissant piéger par lui. Il importe alors de s’ouvrir à un regard extérieur. Pour ce faire, le conseil de faculté a nommé un comité international d’évaluation de sept membres (CIE). Après une évaluation générale de la faculté (recherche, pédagogie et administration), le comité a rédigé un rapport dans lequel il a fait des recommandations qui, pour l’essentiel, ont été retenues (1998)8. Plus encore, il s’agit, pour la faculté, de préciser à nouveau sa vocation, sa mission et sa stratégie en fonction d’un climat général qui a évolué quelque peu et nous serre de toutes parts. Il importe de faire preuve à la fois de discernement par rapport au temps présent et d’audace assaisonnée d’humilité dans l’exercice de ce ministère de formation.

D) Un climat complexe et flou

A bien des égards, dans les années soixante-dix, le rapport avec les différents courants de pensée qui traversaient la société et les Eglises était plus aisé. On croyait encore au débat d’idées, et une pensée cohérente semblait toujours possible. Bref, l’intelligence de la vérité était encore envisagée, malgré les fissures apparentes dans les systèmes de pensée qui s’appuyaient sur les seules lumières de la raison.

Aujourd’hui, la situation est plus complexe et plus floue. Elle correspond, en quelque sorte, à une période de transition dans laquelle l’opinion personnelle prime sur le souci de vérité. Chacun a droit à sa vérité et il ne faut surtout pas la remettre en cause ou même la questionner. Toute pensée considérée comme trop typée, c’est-à-dire fondée, cohérente et morale, est objet de soupçon pour ne pas dire d’emblée écartée. Dans ses Mémoires, Jean Sérisé, collaborateur de Mendès France et conseiller écouté de Valéry Giscard d’Estaing,

débusque aimablement une France sans convictions et sans règles du jeu, sans projets collectifs et sans éthique individuelle…9

Le constat peut sembler sévère et on peut soupçonner J. Sérisé d’être nostalgique d’une France révolue. Mais il n’est pas le seul à nous faire part de son « pessimisme tranquille et de son inquiétude sobre ». Je pense, en particulier, à l’analyse surprenante et stimulante que Jean-Claude Guillebaud livre dans son tout dernier livre, La refondation du monde. Dans ses « Questions préalables », il dépeint, à coups de pinceau incisifs, la génération à laquelle nous appartenons et dont nous ne pouvons pas nous empêcher d’être solidaires. Il parle de « performances quantifiées », de « complaisances pour le relativisme », de « fétichisation de l’individu désaffilié », de « la fin des pensées totalisantes », du « règne versatile de la démocratisation d’opinion », des « pesanteurs du tout-marché et de la technoscience », de « la raideur du droit substitué aux croyances collectives » et à « l’évanouissement définitif des utopies et de l’espérance ». Dans le discours quotidien, qu’on ne cesse de nous répéter sur tous les tons, « quelque chose sonne dramatiquement faux » et nous empêche l’accès aux questions fondatrices pourtant si essentielles à la mise en œuvre de la vie dans la cité des hommes. Afin qu’il n’y ait aucune ambiguïté, Guillebaud précise sa pensée en ces termes:

Nous, citoyens modernes, répugnons désormais aux interrogations trop directes sur les questions essentielles, nous préférons les débats de procédures, fussent-ils byzantins; nous privilégions d’instinct les questions de méthodes plutôt que les urgences de fond. Pour ces dernières, et assez extraordinairement, nous faisons comme si les choses allaient de soi ou, au pire, pouvaient toujours être renvoyées à plus tard. Il existe, en d’autres termes, une désinvolture de bon ton, un déni ontologique qui pèsent sur chacun de nous comme une injonction. On ne se risque plus beaucoup par les temps qui courent à aborder de front ce qui touche à l’essentiel10.

E) Les fondements d’une réflexion panoramique

Guillebaud ne s’arrête pas là. Malgré les ricanements de la modernité « cancanière et finaude », il invite, non sans courage, à s’intéresser aux questions fondatrices sans tomber dans le piège de la nostalgie du passé. En effet, moraliser et légiférer ne suffisent pas pour reconstruire la société civile11. Il ne s’agit pas de restaurer un passé idéal ni un âge d’or qui n’a jamais existé, mais de revenir aux sources de notre civilisation12, afin de poser des fondements, pour le présent comme pour l’avenir, à notre vision du monde. « Plus que jamais s’impose le besoin de perspective, de remise en cohérence, de réflexion panoramique… »13

Nous voilà au cœur même de la théologie, tout au moins de la théologie chrétienne historique qui s’enracine dans le terreau biblique et, en particulier, dans la doctrine des Apôtres. C’est un aspect essentiel de la théologie réformée que d’offrir une vision globale, une réflexion panoramique de Dieu, du monde, de l’homme, du mal et du salut qui éclaire la réalité en vérité. Lorsque la créature se place dans ce cadre, elle peut assumer pleinement sa vocation et sa destinée humaine avec sérénité et joie.

Malgré les apparences et l’évolution des mentalités de notre monde, les enjeux n’ont guère changé. Lorsque nous prenons le temps de la réflexion ou lorsque les circonstances nous y poussent, nous butons toujours à nouveau contre les mêmes questions fondamentales: « D’où viens-je, que suis-je, où vais-je? »14

F) Vocation et mission

La vocation de la faculté est de promouvoir le rayonnement de la théologie réformée confessante au sein du protestantisme francophone.

Pour ce faire, la faculté s’attache, et par ordre de priorités:

• à la formation des pasteurs et autres ministres;

• au rayonnement de la théologie réformée au sein du peuple de l’Eglise, dans le monde universitaire et la société civile.

Se situant dans un contexte d’indifférence et souvent à contre-courant, la faculté conçoit son travail comme un effort missionnaire: un investissement à fonds perdus auquel ne correspondent pas de critères de rentabilité immédiate. Elle s’adresse à un public (étudiants, membres ou non des Eglises, universitaires) pour lequel la théologie réformée reste largement inconnue.

G) La théologie réformée confessante

C’est la théologie protestante de tradition calvinienne telle qu’elle est définie dans les confessions et catéchismes de la Réforme. Celle-ci s’enracine dans la doctrine des Apôtres et se reconnaît dans les symboles de l’Eglise primitive.

Dans une conjoncture marquée par la sécularisation de la société et de l’Eglise, par le relativisme de la pensée et de l’éthique, par les dialogues interreligieux diffus, la théologie réformée confessante se caractérise par son attachement à:

• la doctrine de l’inspiration verbale des Ecritures telle qu’elle a été définie dans la Confession de foi de La Rochelle;

• un modèle cohérent de formation théologique et pastorale dont la tâche est de repréciser la spécificité des fondements, des méthodes, de la pédagogie et des finalités de la théologie chrétienne réformée, et par là de se donner les moyens d’un témoignage fidèle et pertinent.

C’est donc une théologie de conviction fondée sur la vérité objective de la révélation et du message biblique que les professeurs souhaitent promouvoir. Dans une lettre qu’il a envoyée à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire, A.-G. Martin a écrit:

Dans une société gagnée par l’émotif, les chrétiens ne doivent pas mépriser l’intelligence comme don de Dieu. La tâche de la théologie demeure, tout à la fois ferme dans ses convictions et humble dans son discours; exigeante dans sa recherche intellectuelle et claire dans sa formulation; obéissante à son Seigneur et libre de toute mode de pensée.

H) Défis et projets

Lors de conversations que j’ai pu avoir avec des responsables et fidèles d’Eglises cet été, voici quelques-uns des défis qu’ils ont mentionnés comme devant être relevés par la théologie dans les toutes prochaines années:

• Le dialogue interreligieux: comment être à l’écoute des différentes religions tout en affirmant que Jésus est le chemin, la vérité et la vie?

• L’avènement d’une spiritualité à la dimension de l’homme, qui refuse toute référence à Dieu. Pourtant, seul le Dieu infini et personnel peut répondre durablement aux aspirations humaines les plus profondes. Comment le communiquer et en rendre compte?

• La redécouverte de la loi de l’Alliance et de son actualité; de sa capacité à éclairer le comportement individuel et collectif de nos contemporains sans renoncer pour autant à la liberté qui nous est offerte en Jésus-Christ.

• L’importance de reprendre en profondeur la question de l’Eglise, de sa vocation, de sa mission en tant que corps du Christ et de ses ministères.

• L’œcuménisme. Non pas tant l’institutionnel, mais celui qui est vécu de plus en plus au niveau de la base et qui se manifeste par exemple dans la pratique des mariages mixtes. Comment rechercher l’unité sans pour autant sacrifier la vérité et ses exigences?

• Le développement de la formation théologique des laïcs, de l’accompagnement pastoral et de l’éducation chrétienne face à l’érosion de la société civile, de la famille et de l’école.

Cela dit, la tâche prioritaire de la faculté est de former des pasteurs; et à côté de cette formation pastorale, de satisfaire une demande de plus en plus pressante: celle de la formation à l’évangélisation et à l’implantation de nouvelles Eglises. Il s’agit aussi d’intensifier la recherche et les publications, de consolider et redéployer le cursus, de recruter de nouveaux étudiants et amis, de développer les relations avec l’université (homologation des diplômes) et d’autres institutions théologiques et de réaménager certains aspects de l’administration.

Les chantiers ne manquent donc pas et la tâche est vaste, mais nous sommes habités par un enthousiasme certain, étant convaincus que la petite institution que représente la faculté fait partie du plus grand projet, celui qui trouve son origine dans le cœur de Dieu, c’est-à-dire dans sa pensée.

C’est par la sagesse qu’une maison se construit,

Et par l’intelligence (le discernement) qu’elle s’affermit;

C’est par la connaissance que les chambres se remplissent

De tous les biens précieux et agréables. (Pr 24: 3-4)

Que la faculté soit une telle maison, remplie des trésors de la sagesse divine en vue de l’édification de l’Eglise et du renouveau de la cité des hommes!


* P. Berthoud est doyen de la Faculté libre de théologie réformée d’Aix-en-Provence. Ce texte présente l’essentiel de son intervention, le 10 octobre 1999, lors de la célébration du vingt-cinquième anniversaire de la faculté.

1 M. Longeiret, D’une Faculté de théologie à l’autre (1962- 1974). En 1962, on évoque la création d’une faculté « évangélique »; l’année 1966-1967 est la dernière de la Faculté de théologie protestante.

2 Union nationale des Eglises réformées évangéliques indépendantes (UNEREI).

3 La Foi réformée en France (Aix en Provence: Ed. Kerygma, 1995), 20.

4 Stichting Kampen Aix-en-Provence.

5 Il s’agit de l’Eglise chrétienne réformée aux Pays-Bas (Christelijke Gereformeerde Kerken in Nederland), l’Alliance réformée dans l’Eglise réformée hollandaise (Gereformeerde Bond in de NHK; Nederlands Hervormde Kerk) et la Mission des communautés réformées (Zending der Gereformeerde Gemeenten).

6 Au nombre d’étudiants diplômés, il convient d’ajouter un certain nombre d’étudiants qui, après une ou deux années d’études de la théologie, ne se sont pas sentis appelés à exercer un ministère spécialisé dans l’Eglise et ont suivi une autre voie, leur activité et leur témoignage bénéficiant de l’acquis obtenu pendant leur séjour à Aix.

7 Licence: 39, dont 16 en première année; sur place: 24, dont 11 en première année à distance; 15, dont 5 en première année. Maîtrise: 16, dont 6 en première année et 3 nouveaux. Doctorat: 24, dont 5 nouveaux.

Il y a 51 Français et 29 étrangers: 8 Européens (Belgique: 1; Espagne: 1; Pays-Bas: 2; Royaune-Uni: 1; Suisse: 3), 10 Africains (Algérie: 2; Burkina-Faso: 1; Cameroun: 1; Congo: 1; République démocratique du Congo, ex-Zaïre: 1; Côte d’Ivoire: 1; Gabon: 1; Guinée: 2), 4 de Madagascar, 1 de l’île Maurice, 2 de Corée du Sud et 4 Américains (Etats-Unis).

Appartenance ecclésiastique: 32 réformés (EREI: 14; ERF: 9; autres: 9), 34 évangéliques, 9 pentecôtistes, 1 luthérien, 2 adventistes, 1 nazaréen et 1 catholique romain.

8 Les domaines concernés sont les suivants: la recherche, le cursus académique, l’accompagnement des étudiants, le recrutement des étudiants et de nouveaux amis, l’organigramme et les rapports de la FLTR avec l’université et d’autres institutions théologiques.

9 Mémoires d’un autre (Editions de Fallois, 1999). Compte rendu par Alain Duhamel, Le Point n° 1411, 1er octobre 1999, 21.

10 J.-C. Guillebaud, La refondation du monde (Paris: Seuil, 1999), 9 et 10.

11 Civisme, conscience professionnelle minimale, respect des interdits fondateurs (cf. pages 13 et 14).

12 Pour Guillebaud, il s’agit de la pensée grecque, du judaïsme et du christianisme.

13 Ibid., 24.

14 F. A. Schaeffer, L’héritage du christianisme face au XXIe siècle (How Should We Then Live?). Ecrit en 1976, cet ouvrage reste d’une remarquable actualité. A paraîtra en 2000, édité par la Maison de la Bible.

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