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Modèles de spiritualité dans la Bible : Abraham, David, Job et Pierre

MODÈLES DE SPIRITUALITÉ DANS LA BIBLE :
ABRAHAM, DAVID, JOB ET PIERRE

Gert KWAKKEL[1] [1]

Introduction

La spiritualité ne mérite le qualificatif d’« évangélique » que si elle prend à cœur les enseignements du Saint-Esprit dans la Parole écrite de Dieu. Par conséquent, si quelqu’un veut développer une perspective évangélique sur la spiritualité, il est absolument nécessaire qu’il examine ce que la Bible enseigne à ce sujet.

Dans cet article, un certain nombre d’éléments bibliques relatifs à la spiritualité seront analysés. Afin de trouver les données bibliques correspondant au sujet, une définition adéquate de la spiritualité est nécessaire. En tant que bibliste chrétien travaillant dans le contexte de la théologie réformée, je définis la « spiritualité » comme étant ce que fait un croyant pour cultiver sa relation avec Dieu. Plus particulièrement, la spiritualité se rapporte, selon ma conception, à des « exercices » comme la lecture biblique, la méditation et la prière[2] [2].

L’accent mis sur la pratique de la relation avec Dieu au moyen de ces exercices distingue la spiritualité de l’éthique, laquelle se concentre sur d’autres aspects de la vie quotidienne. La spiritualité se distingue aussi de la liturgie en ce qu’elle se concentre sur les expériences personnelles du croyant et ses sentiments intérieurs, et non sur le culte public. Ce sont ces caractéristiques qui m’ont orienté dans l’étude des données bibliques présentées dans cet article. Toutefois, vu la nature de ces données bibliques, des chevauchements avec l’éthique et la liturgie sont inévitables. Si tous les aspects relatifs à l’éthique et à la liturgie avaient été exclus, une bonne présentation des modèles bibliques de spiritualité discutés dans cet article aurait été impossible.

Le terme « modèles » présent dans le titre de cet article fait référence à des personnages bibliques qui peuvent nous aider à façonner notre propre spiritualité. Il est clair que d’autres éléments dans la Bible, comme les Psaumes et le Notre Père, pourraient également être considérés comme des modèles pour la vie spirituelle des chrétiens, mais nous n’en parlerons pas ici. Trois personnages ont été choisis dans l’Ancien Testament, à savoir Abraham, David et Job. Pierre a été choisi comme modèle dans le Nouveau Testament. Il va sans dire que plusieurs autres modèles auraient pu être évoqués. La raison principale pour laquelle j’ai choisi ces trois personnages vétérotestamentaires est que j’ai étudié plusieurs textes les concernant ces dernières années. Le choix de Pierre sera justifié au début de la section 4.

I. Abraham

Dans le Nouveau Testament, Abraham[3] [3] est mentionné plus d’une fois comme un exemple de ceux qui croient en Jésus-Christ. En Romains 4.11-12, 16, l’apôtre Paul présente Abraham comme le père de tous les croyants. Dans ce contexte, il souligne qu’Abraham n’a pas faibli dans sa foi quand il a vu que lui et sa femme Sara étaient trop vieux pour avoir un fils, comme Dieu le leur avait promis (4.19). « Mais face à la promesse de Dieu il ne douta point, par incrédulité […]. » (4.20)[4] [4] De même, Hébreux 11 présente Abraham comme un des témoins pouvant inspirer les croyants du Nouveau Testament dans la manière de vivre leur foi.  Abraham pourrait même être considéré comme le plus important d’entre eux, le chapitre lui consacrant davantage de versets qu’à aucun autre témoin de l’Ancien Testament. Il semble donc pleinement justifié d’étudier l’histoire d’Abraham telle qu’on la trouve dans la Genèse, afin de se faire une idée claire de la façon dont ce patriarche peut servir de modèle biblique de spiritualité.

Comment Abraham a-t-il cultivé sa relation avec Dieu ? Tout au début de l’histoire d’Abraham dans la Genèse, le lecteur est frappé par la prompte obéissance du patriarche à l’ordre divin de quitter son pays et son peuple pour se rendre en Canaan (Gn 12.4). Abraham obéit également aux ordres de Dieu lorsqu’il circoncit chaque mâle de sa maisonnée (17.23) et lorsqu’il chasse Agar et Ismaël (21.12-14). Son obéissance atteint son point culminant lorsqu’il accepte l’ordre de Dieu d’offrir Isaac en holocauste (voir en particulier Gn 22.16, 18).

Quand Abraham arrive en Canaan et voyage à travers le pays jusqu’à Sichem, l’Éternel lui apparaît et lui promet de donner le pays à ses descendants. Abraham réagit en construisant un autel à l’Éternel (12.7). En dehors de l’autel évoqué dans le récit du sacrifice d’Isaac (22.9), Abraham construit également un autel entre Béthel et Aï (12.8), et un autre à Hébron (13.18). En ce qui concerne le premier, la Genèse dit qu’il y invoque le nom de l’Éternel (12.8 ; 13.4). Il fait de même à Beer-Sheva, où il ne construit pas un autel mais où il plante un tamaris (21.33 ; cf. 26.25).

La Genèse ne précise pas ce que construire des autels et invoquer le nom de l’Éternel signifiaient pour Abraham, mais certains aspects de sa spiritualité peuvent être déduits, avec certitude, du récit de ces actes. Construire un autel est un acte visible et invoquer le nom de l’Éternel est une réalité audible. En accomplissant ces actes, Abraham confesse publiquement que l’Éternel est son Dieu, qu’il veut le servir et qu’il compte sur son aide. Il se peut qu’il ait fait une confession publique semblable en donnant à Melchisédek, qui venait de le bénir au nom du Dieu Très-Haut, la dîme de tous les biens qu’il avait récupérés de Kedorlaomer et de ses alliés (14.18-20).

En dehors des textes où il est précisé qu’Abraham invoque le nom de l’Éternel, la Genèse mentionne seulement deux prières du patriarche, en Genèse 18.23-32 et 20.17. Ces deux prières sont des prières d’intercession pour les autres. Dieu lui-même rattache la seconde, en faveur d’Abimélek, roi de Guérar, de sa femme et de ses esclaves, au statut prophétique d’Abraham (20.7). La première, en faveur des justes de Sodome, souligne la franchise manifestée par Abraham dans son intercession. Le patriarche rappelle à l’Éternel qu’en tant que Juge de toute la terre il ne saurait mettre à mort le juste avec le méchant (18.25). Bien qu’il soit conscient de n’être que « poussière et cendre » (18.27), Abraham ose poursuivre son intervention jusqu’à ce que l’Éternel lui promette de ne pas détruire la ville, s’il s’y trouve seulement dix justes (18.32).

Abraham obéissait aux ordres de son Dieu et connaissait la puissance de la prière. Pourtant la Genèse ne dit jamais qu’il consultait l’Éternel au moyen de la prière ou d’une autre manière lorsqu’il prenait une décision. Il est possible qu’il ait invoqué le nom de l’Éternel avant d’aller à la poursuite de Kedorlaomer (Gn 14), avant de conclure un traité avec Abimélek, roi de Guérar (Gn 21.22-31), avant d’aller acheter la caverne de Makpéla (Gn 23) ou avant d’épouser Qetoura (25.1), mais la Genèse ne le précise pas. Elle nous donne plutôt l’impression que, dans toutes ces situations, Abraham a agi de sa propre initiative.

Apparemment, il en est de même lorsqu’il se rend en Égypte à cause de la famine qui sévit en Canaan (12.10). Bien que l’Éternel ait promis de le protéger (12.3), il agit de sa propre initiative lorsqu’il demande à Sara de dire qu’elle est sa sœur. Il agit ainsi, non seulement parce qu’il a peur pour sa vie, mais aussi parce qu’il espère être bien traité (יטב Qal) à cause d’elle (12.13). Genèse 12.16 souligne que cet espoir s’est réalisé, puisque le pharaon l’a bien traité (יטב Hifil) à cause de Sara en lui donnant du petit et du gros bétail, des ânes, des serviteurs et des servantes, des ânesses et des chameaux. Abraham a même tellement reçu que, de retour en Canaan, Lot et lui ne peuvent plus vivre ensemble.

On est étonné, en lisant cette histoire, que l’Éternel n’ait pas reproché à Abraham d’avoir sacrifié l’honneur de sa femme pour sauver sa vie. Le récit indique clairement l’infériorité morale d’Abraham par rapport à celle du pharaon, puisque le patriarche n’a apparemment  rien à répondre aux reproches de celui-ci (12.18-19). L’Éternel n’inflige de grands maux qu’au pharaon et à sa maisonnée (12.17). La Genèse ne dit rien d’une quelconque action corrective, à ce moment-là, de Dieu à l’égard d’Abraham.

L’heureuse suite qu’a entraînée l’attitude d’Abraham en Égypte explique peut-être le fait étrange qu’il l’ait répétée, plusieurs années plus tard, quand il s’est installé sur le territoire d’Abimélek, roi de Guérar (Gn 20). Si cette supposition est correcte, Genèse 20 n’a pas à être considéré comme un simple doublet de 12.10-20, comme le fait habituellement la recherche historico-critique. À Guérar, Abraham prospère tout autant qu’en Égypte, car Abimélek lui donne des moutons, des bovins, des serviteurs et des servantes (20.14). Et, comme en Genèse 12, Dieu ne lui demande pas compte de son attitude et n’adresse de menaces qu’à Abimélek (20.3-7). Genèse 20 laisse également entendre qu’Abraham était moralement inférieur au roi. Cette fois-ci, Abraham réagit face aux reproches du roi, mais ses propos sont pauvres et faibles. Contrairement à ce qu’estimait Abraham, Abimélek montre clairement qu’il craint Dieu, si bien qu’Abraham n’a rien à craindre (20.9-13).

Les deux récits (en Gn 12.10-20 et en 20) soulignent comment Dieu a montré sa faveur à Abraham et l’a protégé (cf. aussi Ps 105.12-13). Ils montrent clairement que, lorsque Abraham agissait de sa propre initiative, il était en dessous de ce qu’un chrétien ordinaire pourrait attendre d’un « saint ».

Pourtant, en dépit de ses échecs, Abraham est un croyant solide. Ceci ne signifie pas qu’il n’y a jamais eu de moment de doute dans sa vie. Genèse 15 et 17 montrent bien le conflit entre la foi et l’incrédulité dans le cœur du patriarche. En Genèse 15.1, à l’Éternel qui lui promet une très grande récompense, Abraham répond en soulignant que cela n’a pas de sens, puisque Dieu ne lui a pas donné d’enfants, et qu’il doit tout laisser à son serviteur Éliézer (15.2-3). Apparemment, il ne s’attend plus à ce que l’Éternel accomplisse sa promesse en lui donnant un fils. L’Éternel réagit en lui précisant qu’un fils issu de son propre sang sera pourtant son héritier et que sa descendance sera aussi nombreuse que les étoiles (15.4-5). L’Éternel triomphe ainsi du scepticisme d’Abraham, car le texte continue ainsi : « Abram crut en l’Éternel qui le lui compta comme justice. » (15.6)[5] [5] Néanmoins, lorsque, au verset suivant, l’Éternel rappelle à Abraham sa promesse qu’il possédera le pays de Canaan, sa foi ne l’empêche pas de demander : « À quoi reconnaîtrai-je que je le posséderai ? » (15.7-8)

En Genèse 17.16, Dieu dit à Abraham qu’il lui donnera un fils par Sara et qu’elle sera la mère de plusieurs nations. Abraham réagit en tombant face contre terre, en riant et en posant certaines questions (17.17-18). En tombant face contre terre, tout comme en 17.3, Abraham, de toute évidence, s’humilie devant Dieu et s’abandonne à lui[6] [6]. Mais en ce qui concerne le sens de ce rire, il faut mettre en parallèle Genèse 18 qui parle de Sara. Lorsque Sara entend la promesse de Dieu qu’elle aura un fils l’année suivante (18.10), elle aussi rit et se demande si les paroles de l’Éternel peuvent réellement s’accomplir (18.12), tout comme Abraham en 17.17. En Genèse 18, l’Éternel demande compte à Sara de son attitude et lui rappelle que rien n’est trop difficile pour lui. Sara essaie alors en vain de se reprendre et nie avoir ri, ce qui manifeste clairement que son rire était coupable (18.13-15).

Ce parallèle laisse entendre que le rire et les questions d’Abraham en Genèse 17.17 témoignent aussi de ses doutes en ce qui concerne la promesse de Dieu. Cette impression est confirmée par le verset 18, où Abraham propose une autre solution à l’Éternel, à savoir qu’il bénisse Ismaël. Cette suggestion montre qu’Abraham n’est pas prêt à accepter une réponse positive à ses questions du verset 17 : « Naîtrait-il un fils à un homme de 100 ans ? Sara, âgée de 90 ans, accoucherait-elle ? » Dans sa réponse, l’Éternel affirme qu’il va, en effet, bénir Ismaël, mais il rejette la solution de remplacement d’Abraham. Dieu s’oppose aux doutes d’Abraham en répétant que Sara aura un fils et que ce fils devra être appelé Isaac (17.19-21).

Après cela, Dieu laisse Abraham (17.22). Le récit s’achève en relatant comment le patriarche obéit aux ordres de Dieu en circoncisant chaque mâle de sa maisonnée (17.23-27). Il n’est pas précisé explicitement qu’Abraham a accueilli les promesses de Dieu par la foi, mais son obéissance montre qu’il n’y a aucune raison d’en douter[7] [7].

Après Genèse 17, le thème de la confiance d’Abraham en l’Éternel revient en Genèse 22.8 et 24.7. Dans le premier texte, Abraham répond à la question d’Isaac : « Où est l’animal pour l’holocauste ? » (22.7) en affirmant que l’Éternel pourvoira lui-même à l’agneau pour l’holocauste. Cette réponse est, sans doute, un peu évasive, mais elle peut aussi indiquer qu’Abraham croyait que, d’une manière ou d’une autre, Dieu fournirait un moyen de sortir de l’impasse créée par son ordre de sacrifier Isaac (cf. Hé 11.19). Dans le second texte, Genèse 24.7, Abraham exprime sa conviction que Dieu enverra son ange devant son serviteur, en Aram Naharaïm (Mésopotamie), afin de l’aider à trouver une femme pour Isaac. Ces deux textes se rapportent à des phases ultérieures de la vie d’Abraham. On peut donc supposer qu’à cette époque-là il avait grandi dans la foi et la confiance. L’accomplissement de la promesse de la naissance d’Isaac, en Genèse 21.1-7, pourrait bien avoir contribué à cette croissance.

Les résultats de l’étude ci-dessus peuvent être résumés comme suit :

  1. Quand Abraham recevait des ordres de son Dieu, il obéissait toujours volontiers.
  2. S’il avait des doutes concernant ce que Dieu allait faire ou ce qu’il avait dit, il les exprimait franchement.
  3. Dieu ne lui reprochait pas d’exprimer ses doutes, mais il lui donnait du temps pour grandir dans la foi et la confiance.
  4. Apparemment, pour Paul et pour l’auteur de l’épître aux Hébreux, cela était suffisant pour affirmer qu’Abraham a mis sa confiance en Dieu sans vaciller (à moins qu’on ne préfère supposer que ces auteurs néotestamentaires ont mal lu le livre de la Genèse…  attitude plutôt étrange de la part d’un évangélique).

II. David

Dans le discours qu’il adresse aux Juifs dans la synagogue d’Antioche de Pisidie, l’apôtre Paul résume le témoignage que Dieu a rendu à propos de David dans un certain nombre de textes de l’Ancien Testament : « J’ai trouvé David, fils d’Isaï, homme selon mon cœur, qui accomplira toutes mes volontés » (Ac 13.22 ; cf. 1S 13.14 ; Ps 89.20). En Hébreux 11.32-34, David est mentionné, à côté de Gédéon, Barak, Samson, Jephté, Samuel et les prophètes, comme un des témoins de l’Ancien Testament qui ont vécu, agi et vaincu par la foi. Mais, contrairement à Abraham, dont la foi est longuement décrite en 11.8-18, David est mentionné seulement en passant dans ce chapitre. Dans le reste du Nouveau Testament, David est présenté surtout comme un prophète : l’Esprit de Dieu a parlé, par sa bouche, dans les Psaumes[8] [8].

Les brèves mentions consacrées à David dans le Nouveau Testament ne le présentent pas comme un modèle de spiritualité au même titre qu’Abraham. Il est toutefois clairement présenté comme un modèle de spiritualité dans le livre des Psaumes. Les motsלְדָוִֽד  « de David » dans les titres de beaucoup de Psaumes ne devraient probablement pas être interprétés comme signifiant que David en est l’auteur. Mais cette indication est à l’évidence une invitation à lire les Psaumes dans une perspective davidique. David est un exemple digne d’imitation pour tous ceux qui veulent prier Dieu et le louer.

Les parties du premier livre des Chroniques qui n’ont pas de parallèles dans les livres de Samuel et des Rois décrivent David comme étant l’homme qui a fait des préparatifs pour la construction du temple (1Ch 22 ; 28) et qui a organisé le culte (1Ch 23-26). David a fait des dons considérables pour la construction du temple et il a encouragé les responsables du peuple à suivre son exemple. Il confesse qu’en agissant ainsi, lui et son peuple n’ont fait que rendre à Dieu ce qu’ils avaient reçu de sa main (29.1-19). De plus, il encourage son fils Salomon à suivre l’Éternel de tout son cœur et à garder ses commandements (22.12-13 ; 28.8-9).

Je reconnais que la définition de la spiritualité envisagée dans cet article ne recouvre pas tous ces éléments. Mais ceux-ci révèlent clairement ce qui se trouvait dans le cœur de David et comment il cultivait sa relation avec Dieu. Le reste de cette section se concentrera non pas sur les Psaumes et les Chroniques, mais sur les indications des livres de Samuel au sujet de la vie spirituelle de David. La raison de ce choix est que les livres de Samuel traitent beaucoup plus des échecs et des péchés de ce grand personnage[9] [9]. Par conséquent, ces livres nous lancent un plus grand défi que les autres pour reconnaître en David un modèle de spiritualité.

En 1 Samuel 13.14, Samuel dit à Saül : « L’Éternel s’est cherché un homme selon son cœur, et l’Éternel l’a établi conducteur de son peuple, parce que tu n’as pas observé ce que l’Éternel t’avait commandé. » Et en 1 Samuel 15.28, il lui confirme que l’Éternel a donné son royaume « à un autre, qui est meilleur que toi ». De toute évidence, ces témoignages font référence à David. Celui-ci est un homme selon le cœur de Dieu, meilleur que Saül. De plus, 1 Samuel 13.14 laisse entendre que, contrairement à Saül, David gardera les commandements de l’Éternel.

Plusieurs éléments dans la description des actions et des attitudes de David dans les chapitres suivants de ce livre confirment ce témoignage. David ne supporte pas que Goliath ose défier les armées du Dieu vivant. Il est persuadé que, lorsqu’il s’avancera contre Goliath au nom de l’Éternel, son Dieu lui livrera Goliath à cause de son insolence (1S 17.26, 36-37, 45-47). Lorsqu’il est en fuite devant Saül, David refuse, à plusieurs reprises, de profiter de l’occasion qui se présente à lui de tuer son ennemi, parce que Saül est celui qui a reçu l’onction de la part de l’Éternel. Il laisse le jugement et la vengeance à Dieu. Il attend patiemment le jour où Dieu le délivrera et le fera monter sur le trône (1S 24 ; 26.8-11, 23-24 ; 2S 1 ; cf. aussi 2S 3.39 ; 16.10-12).

David est tellement dégoûté par ceux qui l’ont chassé du pays de la promesse, l’incitant ainsi à servir d’autres dieux, qu’il n’hésite pas à les maudire (1S 26.19). Quand, après le pillage de Tsiqlag par les Amalécites, ses hommes parlent de le lapider, il puise de nouvelles forces en l’Éternel son Dieu (1S 30.6 ; cf. aussi 23.16). Dans plusieurs autres occasions, il se fortifie en l’Éternel en le louant pour ses actes de délivrance (2S 4.9 ; 5.20 ; 7.22-29 ; 22 ; cf. aussi 8.11-12).

Plusieurs fois, David a consulté l’Éternel avant d’agir. Après avoir reçu une réponse de l’Éternel, il acceptait les instructions divines et les accomplissait de bon cœur[10] [10]. Dans plusieurs occasions, toutefois, les livres de Samuel ne mentionnent pas que David ait consulté l’Éternel avant de prendre certaines décisions[11] [11]. Il est certes possible qu’il l’ait fait dans certains de ces cas, mais dans d’autres il est très probable qu’il ne l’a pas fait. Quand Nabal refuse de donner à David et à ses hommes une part du festin qu’il avait organisé pour la tonte des moutons, il est évident que David n’a pas consulté l’Éternel avant de décider de tuer Nabal et ses hommes. Il se serait certainement vengé de Nabal si Abigaïl n’était pas intervenue (1S 25.12-13, 21-22, 32-34). De même, il semble très improbable que Dieu ait conseillé à David de se rendre chez Akish, roi de Gath, comme il l’a fait selon 1 Samuel 21.10 et 27.1-2[12] [12].

Quand David a agi de sa propre initiative, sans consulter l’Éternel, il a souvent eu recours au mensonge, à la séduction et à la ruse. C’est le cas en 1 Samuel 20.5-7 ; 21.13 ; 28.2 ; 2 Samuel 11.25. Deux exemples de cet aspect du comportement de David nécessitent un commentaire plus ample : premièrement, l’histoire du voyage de David à Nob et sa rencontre avec le prêtre Ahimélek en 1 Samuel 21.1-9 ; deuxièmement, sa façon de tromper Akish, roi de Gath, quand il était à son service à Tsiqlag, selon 1 Samuel 27.8-12.

Contrairement aux faits, David, qui est en fuite, fait croire à Ahimélek que le roi Saül l’a chargé d’une mission secrète (21.2). Il ne pouvait plus, ensuite, que continuer à déformer la vérité en faisant de vagues remarques sur l’abstinence sexuelle et la sainteté des « choses » (כלים) de ses hommes et sur sa mission (21.5 ; voir aussi 21.8). Il est toutefois trop simple, dans ce cas, de dire que David a induit le prêtre en erreur pour servir ses propres intérêts. Peut-être voulait-il protéger Ahimélek en ne lui révélant pas sa véritable situation, afin que celui-ci ne puisse pas être accusé d’avoir sciemment soutenu quelqu’un en révolte contre le roi. Si telle était son intention, David a tragiquement échoué, car, lorsque Doëg l’Édomite a dévoilé à Saül comment Ahimélek avait aidé David, Saül a décidé de le tuer avec les autres prêtres, soit quatre-vingt-cinq hommes en tout (1S 23.9-19).

À l’époque où David était devenu un sujet d’Akish à Tsiqlag, il faisait avec ses hommes des razzias chez les Gueshouriens, les Guizriens et les Amalécites, des peuplades non israélites qui habitaient dans le désert entre Canaan et l’Égypte (27.8). Mais il a fait croire à Akish qu’il faisait des razzias contre les Judéens vivant dans le Néguev et leurs alliés. Afin d’empêcher ses vraies victimes de révéler la vérité à Akish, il les a toutes tuées, hommes et femmes (27.9-11). David a donc délibérément sacrifié toutes ces vies afin d’induire son seigneur en erreur. C’est le sens premier du texte (voir en particulier 27.11). Mais en massacrant les Amalécites, David a également contribué à l’accomplissement de l’ordre donné par Dieu d’effacer le souvenir d’Amalek (Ex 17.14 ; Dt 25.19). Il est aussi permis d’y voir un contraste avec l’attitude de Saül, qui avait tué des Amalécites mais était allé à l’encontre des ordres de Dieu en épargnant le roi Agag, ainsi que le meilleur de ses moutons et de ses bœufs (1S 15.1-3, 8-9). Les Gueshouriens étaient un des peuples que l’Éternel avait promis de chasser devant les Israélites lors de la conquête de Canaan (voir Jos 13.2-6 ; cf. aussi Ex 23.31). Il en va peut-être de même pour les Guizriens, mais ce peuple n’apparaît dans aucun autre texte biblique.

Il n’est pas nécessaire de poursuivre l’examen de ces aspects ambigus du comportement de David. Il suffit de conclure ce survol en évoquant son adultère avec Bath-Chéba et la façon dont il a provoqué la mort de son mari, Urie (2S 11)[13] [13]. Comment David, qui a agi de cette manière, peut-il être un homme « selon le cœur de Dieu » ? Pourquoi est-il meilleur que Saül, bien que ce dernier n’ait rien fait d’aussi terrible avant d’être rejeté par Dieu ?

L’étude de 2 Samuel 6 sera utile pour trouver des réponses à ces questions. Ce chapitre  rapporte ce qui s’est passé lorsque David a transféré l’arche de Dieu à Jérusalem. L’histoire débute ainsi : « David rassembla encore toute l’élite d’Israël, au nombre de 30 000 hommes. » A la suite de 2 Samuel 5, qui informe le lecteur de trois actions militaires victorieuses, cette précision laisse entendre que David a organisé le transfert de l’arche comme s’il s’agissait d’une campagne ou d’un défilé militaire. Apparemment, il a fait tout cela de sa propre initiative. Le résultat est terrifiant : quand Ouzza étend la main vers l’arche, Dieu le frappe mortellement.

David réagit en se mettant en colère[14] [14]. Il a peur de l’Éternel et de l’arche et il décide que celle-ci n’ira pas à Jérusalem mais restera dans la maison d’Obed-Édom. Toutefois, quand David apprend que l’Éternel a béni la maison d’Obed-Édom à cause de l’arche, il comprend que le danger ne réside pas dans l’arche elle-même. Aussi décide-t-il de la faire transporter à Jérusalem. Cette fois, il organise les choses différemment. Le texte ne mentionne rien qui puisse faire penser à un défilé militaire. Il montre plutôt que David traite l’arche avec le plus de respect possible. L’arche n’est plus transportée sur un chariot, mais sur les épaules des Lévites. David offre des sacrifices et renonce à ses habits royaux ; il porte un simple éphod de lin et « danse de toute sa force devant l’Éternel ».

À l’évidence, il a pris au sérieux la leçon que Dieu lui a fait apprendre par la mort d’Ouzza. Il a compris qu’il pouvait avoir à proximité l’arche comme symbole du Dieu « qui siège entre les chérubins » (2S 6.2) si, du moins, il la traitait avec un grand respect. En présence de l’arche, il devait s’humilier en tant qu’être humain qui, malgré sa royauté, n’était pas plus grand devant Dieu que n’importe quel autre de ses sujets[15] [15].

La fin de l’histoire, la confrontation entre David et sa femme Mikal, renvoie le lecteur au roi Saül, parce que le chapitre fait référence, à trois reprises, à Mikal comme étant « la fille de Saül » (voir 2S 6.16, 20, 23). Elle méprise David quand elle le voit sauter et danser devant l’Éternel comme un homme de rien aurait pu le faire. David lui répond qu’il veut continuer à s’humilier et qu’il préfère être honoré par de simples servantes que par elle, Mikal, avec ses prétentions royales (6.21-22).

David fait preuve d’humilité tandis que Saül désire être honoré aux yeux des hommes. Cette différence est corroborée par ce que 1 Samuel dit du rejet de Saül (cf. ci-dessous sur 1S 15.30). Toutefois, dans les deux chapitres qui racontent cette triste histoire, l’accent principal est mis sur quelque chose d’autre, à savoir le fait qu’à deux reprises Saül avait désobéi aux clairs commandements de l’Éternel. La première fois, il a désobéi en n’attendant pas le prophète, qui lui aurait fait savoir quoi faire (1S 13.13-14)[16] [16]. La seconde fois, il ignore les ordres de Dieu en épargnant Agag, roi des Amalécites, ainsi que le meilleur des moutons et des bœufs (15.18-19, 22-23). Saül a commis ainsi le péché contre lequel Samuel avait averti le peuple dans son discours d’adieu. Samuel avait indiqué que l’Éternel ne pouvait accepter la royauté que si le peuple et son roi obéissaient à Dieu et ne se révoltaient pas contre ses commandements (1S 12.14-15). En 1 Samuel 15.23, Samuel dit à Saül que « l’insoumission est aussi coupable que le péché de divination et la désobéissance aussi grave que le péché d’idolâtrie ». La vérité de ces paroles apparaîtra à la fin de la vie de Saül. Sa désobéissance a eu pour conséquence ultime qu’il a eu recours à la divination, en demandant à la voyante d’Eïn-Dor de faire monter l’esprit de Samuel (1S 28).

David n’a jamais désobéi à des ordres spécifiques de l’Éternel comme Saül l’a fait. Il a pourtant clairement désobéi aux commandements de Dieu lorsqu’il a commis un adultère avec Bath-Chéba et tué Urie. Le prophète Nathan lui a reproché d’avoir méprisé la parole de l’Éternel (2S 12.9). David a répondu en se confessant : « J’ai péché contre l’Éternel ! » (12.13 ; cf. aussi 2S 24.10, 17) Quand Samuel demande des comptes à Saül parce qu’il a épargné Agag et le meilleur des moutons et des bœufs des Amalécites, Saül s’exprime de la même manière : « J’ai péché […]. » (1S 15.24) Toutefois, Saül réduit la valeur de sa confession en ajoutant une excuse : « J’ai eu peur de mécontenter mes soldats, et j’ai cédé à leurs demandes. » (Cf. aussi 15.15, 21) Et quand il répète : « J’ai péché », il poursuit en suppliant Samuel : « Maintenant, je te prie, honore-moi devant les anciens de mon peuple et devant Israël ; reviens avec moi, et je me prosternerai devant l’Éternel, ton Dieu. » (15.30) Le verbe utilisé ici (כָּבַד « honorer ») relie ces mots à 2 Samuel 6.20. La fille de Saül, Mikal, a utilisé le même verbe quand elle a reproché à David d’avoir un comportement indigne de son statut de roi d’Israël. Alors que Saül s’est accroché à cet honneur au lieu de s’humilier, David était prêt à y renoncer.

Les résultats de l’analyse du portrait de David dans les livres de Samuel peuvent être résumés comme suit :

  1. David était un homme avec de nombreux défauts ; il a même commis des péchés très graves. Il savait cependant que Dieu était la seule source de sa force.
  2. Il savait attendre le moment où l’Éternel le délivrerait de ses ennemis et le vengerait. Néanmoins, il a dû passer par un long processus d’apprentissage dont Dieu s’est servi pour lui apprendre ce que signifiait le servir fidèlement comme roi de son peuple.
  3. Il différait du roi Saül en ce qu’il obéissait aux ordres de l’Éternel et écoutait les prophètes. Et même lorsqu’il avait été désobéissant, il savait confesser son péché de tout son cœur.
  4. Contrairement à Saül, il n’hésite pas à s’humilier et à renoncer à son honneur royal devant l’Éternel[17] [17].

Tout cela est caractéristique de cet homme « selon le cœur de Dieu » et en fait un modèle de spiritualité.

III. Job

Job n’est mentionné qu’une seule fois dans le Nouveau Testament, en Jacques 5.11. Dans ce texte, Jacques fait référence à la persévérance de Job et à la bénédiction que l’Éternel lui a accordée dans sa vie après une longue période d’affliction. Il exhorte ses lecteurs à suivre l’exemple de Job et à faire confiance à la compassion et à la miséricorde de Dieu. Dans la mesure où la persévérance peut être considérée comme un aspect de la spiritualité, il est permis d’affirmer que Jacques présente Job comme un modèle de spiritualité. Pour de nombreux chrétiens, Job est en effet un exemple à suivre, en particulier à cause de ses paroles en Job 1.21 : « L’Éternel a donné, et l’Éternel a ôté ; que le nom de l’Éternel soit béni ! »

Job 1.1 précise que Job était intègre et droit. Il craignait Dieu et s’écartait du mal. Ces termes généraux se concrétisent en Job 1.5, qui informe le lecteur d’un élément pratique de la spiritualité de Job. Il avait l’habitude d’offrir des holocaustes pour chacun de ses fils (et de ses filles ?) après qu’ils avaient festoyé. Il le faisait parce qu’il craignait que ses enfants aient péché et maudit[18] [18] Dieu dans leur cœur.

Pour certains interprètes, cette coutume de Job témoigne d’une anxiété et d’un perfectionnisme excessifs[19] [19]. On ne sait pas si l’auteur du livre de Job partageait ce point de vue ou s’il voulait, au contraire, exhorter le lecteur à imiter cet aspect de la conduite de Job. Maudire Dieu est le péché que Satan espérait que Job commettrait s’il perdait ses possessions et sa santé (1.11 ; 2.5). En 2.9, c’est aussi la seule option raisonnable restante pour la femme de Job, dont les paroles montrent que maudire Dieu est un péché très grave, puisqu’il entraînera la mort de son époux malade (cf. aussi 1R 21.10, 13). Dans son contexte particulier, le verset 1.5 cherche, de toute évidence, à souligner à quel point Job détestait le péché que Satan et sa femme l’incitaient à commettre. Cela confirme donc la droiture de Job et sa crainte de Dieu, qui ont été mentionnées en 1.1.

En Job 1.21, Job perd ses dix enfants et presque toutes ses richesses. En dépit de tout cela, il continue à louer Dieu : « L’Éternel a donné, et l’Éternel a ôté ; que le nom de l’Éternel soit béni ! » Il motive son attitude en disant qu’il était nu à sa naissance et qu’il le sera également à sa mort. Par cette affirmation, Job reconnaît que rien ne lui appartient en propre. Dieu a donc le droit de tout lui reprendre.

Ellen van Wolde a suggéré que dans ce verset, Job utilisait une formule toute faite pour exprimer sa foi, ce qui pourrait indiquer qu’il n’avait pas encore affronté sa douleur[20] [20]. Le reste de l’histoire, à partir de 3.1, montre qu’elle a visiblement raison quand elle souligne qu’en 1.21 Job n’en est qu’au début de ses luttes. De plus, il se peut que la formule « que le nom de l’Éternel soit béni » soit une formule liturgique conventionnelle, comme pourraient le laisser supposer l’usage un peu inattendu, par un non-Israélite, du nom YHWH et le parallèle en Psaume 113.2[21] [21]. Néanmoins, la réaction de Job, dans son ensemble, n’est pas commune et elle se distingue de la réaction traditionnelle d’un croyant. Elle est même unique dans l’Ancien Testament. Le livre des Psaumes montre que la réaction normale face aux problèmes graves, ce n’est pas la louange, mais la lamentation. Dans de telles circonstances, les psalmistes avaient l’habitude non pas de dire « louer soit l’Éternel », mais de demander pourquoi  l’Eternel avait agi d’une manière aussi étrange[22] [22].

Job attribue à Dieu seul les malheurs qui l’ont frappé. Il ne mentionne ni les Sabéens, ni les Chaldéens (cf. 1.15, 17) et ne fait pas allusion à Satan. Selon Job 1.6-12, il ne sait rien de ce qui s’est passé au ciel et il n’en sera pas non plus informé plus tard. Il faut noter aussi que le narrateur estime que Job n’attribue rien de scandaleux à Dieu en parlant de la sorte (1.22). Étant donné sa situation et ce qu’il en sait, Job a raison de tout attribuer à Dieu seul.

Après la deuxième série de désastres, lorsque sa femme lui conseille de maudire Dieu et de mourir (2.9), Job lui rétorque : « Tu parles comme une femme insensée ! Quoi ! nous recevrions de Dieu le bien, et nous ne recevrions pas aussi le mal ! » On pourrait être tenté d’interpréter ces paroles comme étant l’expression d’une attitude fataliste, mais un examen plus minutieux montre qu’une telle conclusion serait erronée.

La première partie de la deuxième phrase ne doit pas être comprise comme une question en elle-même. Il s’agit plutôt d’un présupposé sur lequel la question est fondée. L’expression peut être paraphrasée de la manière suivante : « Étant donné que nous avons toujours eu l’habitude d’accepter le bien de la part de Dieu, ne devrions-nous pas aussi en accepter le mal ? » Il faut noter qu’en utilisant la première personne du pluriel « nous », Job inclut sa femme dans ce qu’il dit. Il fait donc appel à son cœur. Il lui rappelle ce qu’ils ont toujours fait jusque-là, c’est-à-dire accepter toutes les bonnes choses comme venant de Dieu. Apparemment, il veut souligner qu’en raison de toutes les faveurs reçues de Dieu, ils savent maintenant comment il est. Puisqu’ils ont appris, depuis longtemps, l’attitude de Dieu à leur égard, soutient Job, il serait déraisonnable de leur part de se révolter maintenant qu’il a fait quelque chose qu’ils ne comprennent pas, aussi grave et terrible que cela puisse être.

Dans sa réponse à sa femme, Job témoigne donc de sa confiance en Dieu et n’exprime pas une attitude fataliste[23] [23]. Toutefois, cette fois-là, Job ne loue plus Dieu, comme il l’avait fait en 1.21b. Il semblerait qu’il ne soit plus capable de le faire. Cela ne lui est pourtant pas reproché, car le narrateur commente : « En tout cela, Job ne pécha point par ses lèvres. »[24] [24]

Dans les dialogues entre Job et ses amis (Job 3-37), ces derniers établissent constamment un lien entre la misère de Job et ses péchés[25] [25]. Job nie que ses péchés puissent être la cause des malheurs qui l’ont frappé et il proteste de son innocence[26] [26]. Il dit que Dieu a écarté (הֵסִ֣יר) son droit (מִשְׁפָּטִ֑י  Job 27.2), ce qui implique qu’il l’accuse d’injustice[27] [27]. Pourtant, il demande à ce même Dieu d’intervenir et de le défendre (19.23-27 ; 23.3-9). Job conclut son argumentation en prononçant une auto-malédiction conditionnelle, dans laquelle il énumère plusieurs genres d’injustice et de péché et nie en avoir commis aucun. Il est tellement convaincu d’être dans son droit qu’il veut mettre sa défense sur son épaule, la porter comme une couronne et s’approcher ainsi du Tout-Puissant comme un prince (Job 31).

Dans ses réponses du sein de la tempête (Job 38-41), Dieu demande compte à Job de ce qu’il a dit. Dieu lui fait clairement des reproches. Néanmoins, contrairement à ce que beaucoup de chrétiens calvinistes et peut-être aussi évangéliques pourraient penser, Dieu ne dit jamais que la misère de Job est liée à ses péchés ou à sa nature pécheresse. Certes, Dieu fait à Job des reproches, mais cela ne signifie pas qu’il soit d’accord avec ses amis ! En fait, un lecteur attentif du livre de Job ne devrait pas être surpris : si Dieu avait été d’accord avec les amis, il aurait contredit son propre témoignage positif au sujet de Job en 1.8 et 2.3.

Si Dieu n’est pas d’accord avec les amis de Job, quelle est la pointe de sa critique à leur égard ? La réponse à cette question se trouve au début de Job 40, texte où Dieu formule ses reproches à l’égard de Job plus précisément qu’ailleurs. Visiblement, le point principal est le désir que Job a eu de vouloir se justifier au détriment de la justice de Dieu :

Veux-tu réellement annuler mon jugement ?

Me condamneras-tu pour te justifier ? (40.8 ; cf. aussi 40.2)

Autrement dit, Job avait le droit de maintenir son innocence, mais il avait tort de conclure que, étant donné son innocence, Dieu ne pouvait qu’être injuste.

Puisque tel est le point précis sur lequel Dieu critique Job, on peut conclure que l’expression de regret présente en Job 40.3-5 et 42.1-6 se concentre sur ce point. Il n’est pas nécessaire d’y voir une déclaration plus générale par laquelle il concéderait à ses amis qu’ils ont eu raison d’attribuer ses malheurs à ses péchés. Il n’est pas logique de supposer que Job a voulu faire une telle déclaration, car Dieu ne l’avait pas du tout encouragé en ce sens.

En Job 42.7-8, Dieu dit à Éliphaz et à ses amis : « Vous n’avez point parlé de moi avec droiture comme l’a fait mon serviteur Job. » Cette déclaration surprend après les reproches que Dieu a adressés à Job en Job 38-41. Comment Dieu peut-il dire que Job a parlé de lui avec droiture ? Si l’on ne peut pas accepter l’idée selon laquelle le livre de Job serait composé d’au moins deux sources contradictoires qui ne peuvent pas être réconciliées l’une avec l’autre d’une manière raisonnable, on doit accepter l’idée qu’il y a quelque chose de paradoxal dans ces paroles de Dieu. Apparemment, Dieu veut souligner qu’en dépit de tous les défauts des discours de Job, il préfère clairement sa manière de parler à celle de ses amis.

Pourquoi Dieu préfère-t-il la manière dont Job a parlé à son sujet ? Parce que les amis de Job pensaient en savoir assez sur la manière dont Dieu gouvernait le monde. Ils pensaient pouvoir expliquer ce qui était arrivé à Job à partir de leur propre compréhension théologique. Ils refusaient d’admettre que la réalité de la vie de Job était en contradiction avec leur point de vue, bien qu’ils n’aient pas réussi à démontrer le contraire. Ils s’accrochaient à leur système théologique aux dépens des faits.

Job a refusé de justifier Dieu en sacrifiant les faits de sa vie à une conviction théologique, si respectable qu’elle puisse être. Il a formulé avec franchise ses questions critiques et les a adressées à ses amis ainsi qu’à Dieu lui-même. Ce faisant, il est allé trop loin en accusant Dieu d’injustice. Néanmoins, en Job 42.7-8, Dieu dit clairement préférer l’attitude ouverte, interrogatrice et critique de Job à une justification de sa conduite divine au moyen d’un système théologique qui ne pouvait être maintenu qu’en ne rendant pas justice aux faits, ce qui avait pour effet, en outre, de faire souffrir Job encore plus au lieu de le secourir.

Les éléments les plus importants de la spiritualité de Job peuvent maintenant être résumés comme suit :

  1. Job a réussi à louer Dieu même après avoir tout perdu, parce qu’il a toujours attribué sa prospérité à Dieu. Il avait pris l’habitude de louer Dieu quand tout allait bien[28] [28].
  2. Quand Job est temporairement incapable de louer Dieu, Dieu ne le condamne pas pour cela, mais il lui laisse le temps d’affronter ce qui s’est passé.
  3. Job n’aurait pas dû accuser Dieu d’injustice. Néanmoins, il s’est mieux comporté que ses amis en formulant ses questions critiques avec franchise, au lieu d’expliquer les actions de Dieu à partir d’un système théologique préétabli qui, en dépit de toute son orthodoxie, ne réussit pas à rendre justice à la réalité de sa vie.

IV. Pierre

Dans le Nouveau Testament, Jésus-Christ lui-même est, à l’évidence, le modèle le plus extraordinaire de spiritualité. Il exhorte ses disciples à suivre son exemple dans différents domaines de la vie, comme renoncer à soi-même, se charger de sa croix (Mt 16.24) et servir les autres (Mt 20.26-28 ; Jn 13.14-15), mais aussi dans des domaines qui se rapportent plus précisément à la spiritualité telle qu’elle est définie dans cet article, comme la prière (voir p. ex. Luc 6.12 et 18.1). Néanmoins, étant sans péché, il était unique en son genre. Il ne peut donc pas être mis au même niveau qu’Abraham, David, Jean et Pierre. Aussi sa spiritualité ne sera-t-elle pas prise en considération dans cet article.

À côté de Jésus, l’apôtre Paul peut être considéré comme un modèle de spiritualité. Toutefois, le Nouveau Testament présente de si nombreuses données concernant sa vie et sa théologie qu’il est impossible de les analyser correctement dans ces quelques pages. C’est pourquoi j’ai choisi l’apôtre Pierre plutôt que Paul.

Pierre a reçu l’honneur d’être le roc sur lequel Jésus construirait son Église (Mt 16.18). À ce titre, il est normal de le considérer comme un modèle de spiritualité. Il est un modèle, en effet, quand il confesse que Jésus est le Christ (Mt 16.16). De plus, dans ses lettres, il a fourni à tous les chrétiens un modèle à suivre. Il les exhorte à mettre leur espérance dans la grâce apportée par Jésus-Christ (1P 1.13), à craindre Dieu (1P 2.17), à être sobres et à veiller (1P 5.8 ; 2P 3.17), et à prêter attention aux paroles des prophètes (2P 1.19).

Le livre des Actes fournit des informations sur le rôle de la prière dans la vie de Pierre. Actes 3.1 rapporte que Pierre et Jean montent au Temple au moment de la prière à 3 heures de l’après-midi. C’était probablement leur habitude lorsqu’ils étaient à Jérusalem (cf. 2.46)[29] [29]. De même, le fait que Pierre monte sur la terrasse de la maison de Simon, à Jaffa, vers midi, afin de prier (10.9) reflète peut-être aussi une habitude, mais on ne peut pas en être sûr puisque midi n’est pas connu comme étant un moment fixé pour la prière[30] [30].

Plutôt que de développer ces points, le reste de cette section sera consacré à un certain nombre de données tirées des évangiles, celui de Jean en particulier. Ces données seront mises en relation avec des éléments de 1 Pierre.

Après que Pierre eut confessé que Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant, Jésus a commencé à enseigner à ses disciples qu’il lui fallait souffrir et mourir à Jérusalem et ressusciter le troisième jour. Pierre le prit ensuite à part et se mit à lui faire des reproches (Mt 16.22 ; Mc 8.32). Jésus lui ayant dit qu’il ne pouvait pas le suivre maintenant, mais qu’il le suivrait plus tard, Pierre lui demanda : « Pourquoi ne puis-je pas te suivre maintenant ? » Il désirait tellement suivre son maître qu’il a affirmé être prêt à donner sa vie pour lui (Jn 13.36-37). Cette même nuit, des soldats envoyés par les chefs des prêtres et par les pharisiens vinrent à Gethsémané pour arrêter Jésus. Pierre essaya alors de défendre son maître en dégainant une épée et en coupant l’oreille droite d’un serviteur du grand prêtre (Jn 18.10).

De toute évidence, Pierre aimait tellement Jésus qu’il ne pouvait accepter ses souffrances et sa mort, même si Jésus avait dit qu’elles seraient le chemin vers la glorification, la résurrection et la vie éternelle (cf. Jean 12.23-25 ; 17.1). Quand Jésus a été sur le point d’être arrêté, il a agi spontanément, comme le lui dictait son cœur. Toutefois, il surestimait ses propres capacités. Quelques heures plus tard, la prédiction de Jésus qu’il le renierait trois fois s’accomplissait (Jn 13.38 ; 18.17, 25-27).

Après sa résurrection, Jésus demande à Pierre à trois reprises : « m’aimes-tu ? » (Jn 21.15-17). Il lui rappelle ainsi l’importance vitale de l’amour dans sa relation avec le Seigneur Jésus. Il répète également l’instruction qu’il lui avait donnée de le suivre (21.19). Cet ordre était en parfait accord avec le propre souhait de Pierre selon Jean 13.37 ; mais Jésus souligne que ses implications seraient différentes de ce que Pierre avait à l’esprit : « En vérité, en vérité, je te le dis, quand tu étais plus jeune, tu attachais toi-même ton vêtement et tu allais où tu voulais ; mais quand tu seras vieux, tu étendras tes mains, et un autre te l’attachera et te mènera où tu ne voudras pas. » (21.18)[31] [31] En guise d’explication, Jean ajoute que Jésus dit cela pour indiquer par quelle mort Pierre glorifierait Dieu (21.19).

Pour Pierre, suivre Jésus impliquait qu’il devait glorifier Dieu par sa mort. À ce moment-là, d’autres personnes décideraient de sa mort. Pierre n’aimerait pas moins son maître que lorsqu’il était jeune. Il serait pourtant très différent du soldat zélé de Jean 13.37. Il ne serait plus un homme indépendant, qui décide pour lui-même de consacrer sa vie au Seigneur et comment le faire.

Selon Jésus, Pierre devra apprendre une attitude différente. À la fin de sa vie, il sera plus patient et moins optimiste sur ses propres capacités. La première lettre de Pierre montre qu’il a bien appris cette leçon.

En 1 Pierre, l’apôtre écrit plusieurs fois au sujet de la souffrance. Il souligne qu’elle est un élément inévitable de la vie chrétienne (1P 4.12). Il exhorte ses lecteurs à suivre l’exemple de Jésus en acceptant patiemment leur épreuve (2.19-23 ; cf. aussi 3.14, 17 ; 4.13-19). De plus, il souligne que les chrétiens doivent souffrir avant d’avoir part à la gloire que le Christ leur a acquise (1.6-7 ; 4.13-14 ; 5.10 ; cf. aussi 5.1). Par conséquent, contrairement à son attitude de l’époque précédant la crucifixion de Jésus où il s’opposait à l’attitude de son Seigneur concernant sa souffrance et sa mort, il a maintenant compris que la gloire doit être précédée par la souffrance (voir aussi 1.11).

De plus, lorsqu’il s’adresse aux anciens, Pierre se présente comme un « ancien comme eux » (5.1), se mettant ainsi au même niveau qu’eux. Il les exhorte à servir avec enthousiasme. Les anciens ne devraient pas dominer comme des seigneurs sur ceux qui leur ont été confiés, mais être des modèles pour le troupeau (5.2-3). Cela montre qu’il avait appris la valeur de la modestie. En parfait accord avec ce point de vue, il leur recommande de se revêtir d’humilité dans leurs rapports mutuels (5.5).

En résumé :

  1. Par son engagement, Pierre a montré que l’amour et le zèle pour le Seigneur Jésus étaient des éléments importants et indispensables d’une vie de disciple authentique.
  2. Au cours de sa vie, il a dû apprendre que la souffrance était également un aspect inévitable de la vie chrétienne.
  3. Il a aussi appris que le zèle n’était fructueux que s’il était associé à la patience, à la modestie et à l’humilité.

Conclusion

Abraham, David, Job et Pierre étaient des personnages bien différents qui ont vécu à des époques et dans des circonstances différentes. Par conséquent, en étudiant leur spiritualité, on trouve des éléments et des aspects divers, comme le montrent les résumés placés à la fin des sections ci-dessus. Néanmoins, des éléments caractéristiques communs à plusieurs de ces personnes les relient les unes aux autres.

Premièrement, la prière est, de toute évidence, un élément essentiel de la spiritualité évangélique. On peut donc être un peu déçu de découvrir que, à l’exception de David, la Bible ne dit pas grand-chose des prières faites par les modèles de spiritualité étudiés dans cet article. Cependant, un aspect remarquable peut être noté, à savoir la franchise que certains d’entre eux (en particulier Abraham et Job) manifestent dans leurs prières. La réponse que Dieu fait à Job montre que nous ne sommes pas libres de dire à Dieu tout ce qui nous passe par la tête. Toutefois, d’autres textes montrent très clairement que Dieu permet à son peuple beaucoup de liberté lorsqu’il exprime ce qui le préoccupe. Autrement dit, Dieu est comme un vrai père, qui aime entendre ses enfants lui parler.

Deuxièmement, l’humilité distingue David de Saül. De même, Pierre exhorte tous les chrétiens à l’humilité. Job a dû admettre qu’en tant que simple être humain, il n’était pas capable de porter un jugement sur la manière dont Dieu gouvernait sa vie et le reste du monde. Abraham confesse qu’il n’est que « poussière et cendre ». Évidemment, l’humilité doit être un élément important de toute spiritualité qui se veut « évangélique ».

Troisièmement, tous ces modèles de spiritualité ont des défauts et des faiblesses. Dans la plupart des cas, Dieu n’en tient pas rigueur à leurs auteurs. Il leur laisse beaucoup de temps pour apprendre ce qu’implique vivre avec lui et grandir dans leur vie spirituelle. Cela s’applique notamment à David et à Pierre, mais également à Abraham et à Job. Ces hommes ne pouvaient devenir des modèles de spiritualité que par l’effet de la grâce de Dieu et de son pardon, et au cours d’un long processus incluant des défaites et des victoires.

Il est probable que si d’autres personnages bibliques avaient été choisis, le résultat aurait été différent. On peut pourtant conclure que les aspects et les éléments que nous venons de mentionner, que l’on peut trouver chez au moins deux des quatre modèles étudiés, devraient être présents dans une spiritualité évangélique authentique.


[1] [32] G. Kwakkel est professeur d’Ancien Testament à la Faculté Jean Calvin d’Aix-en-Provence et à la Faculté de théologie des Églises réformées (libérées) de Kampen (Pays-Bas). Le contenu de cet article a été présenté à la conférence biennale de l’Association européenne des théologiens évangéliques (FEET), Woltersdorf, Allemagne, 22-26 août 2008, sur les perspectives évangéliques sur la spiritualité, et publié en anglais dans le European Journal of Theology, 19, 2010, 16-27, sous le titre « Models of Spirituality in the Bible : Abraham, David, Job and Peter ».

[2] [33] Cf. A.L.Th. de Bruijne, « Ethiek en spiritualiteit », in Gereformeerde theologie vandaag : Oriëntatie en verantwoording, A.L.Th. de Bruijne, sous dir., TU-Bezinningsreeks 4, Barneveld, De Vuurbaak, 2004, 103-106.

[3] [34] Dans cet article, j’utilise le nom plus courant Abraham plutôt qu’Abram, son nom avant que Dieu ne le change selon Genèse 17.5.

[4] [35] Sauf indications contraires, les citations bibliques sont extraites de la Nouvelle version Segond révisée (Colombe).

[5] [36] Sur Genèse 15.1-6, cf. G. Kwakkel, De gerechtigheid van Abram : Exegese van Genesis 15.6, Kamper Bijdragen 35, Barneveld, De Vuurbaak, 1996.

[6] [37] Cf., par ex., Lv 9.24 ; Nb 16.22 ; Jos 7.6 ; Jg 13.20 ; 1S 25.23 ; Ez 1.28 ; 1Ch 21.16.

[7] [38] Contrairement à Claus Westermann, Genesis, 3 vol., BKAT 1/1-3, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1974-1982, 2, p. 323. Westermann souligne, à juste titre, que l’obéissance tient une place plus importante en Genèse 17 que la foi, mais il est douteux d’établir un contraste entre ce chapitre (que Westermann, traditionnellement, attribue à P) et la description d’Abraham comme le père de la foi en Genèse 15.1-6, comme le fait Westermann.

[8] [39] Voir Mt 22.43 ; Ac 1.16 ; 2.30 ; 4.25 ; Hé 4.7.

[9] [40] A noter que le récit de l’adultère de David avec Bath-Chéba et du meurtre d’Urie ne réapparaît pas dans 1 Chroniques.

[10] [41] Voir 1S 23.2-5, 9-13 ; 30.7-8 ; 2S 2.1-2 ; 5.17-25 ; cf. aussi 1S 22.5-6.

[11] [42] Voir 1S 23.24-29 ; 27 ; 2S 1.15 ; 4.12 ; 6.1-2 ; 8.1-14 ; 10.7, 17 ; 11.1 ; 15.14 ; 20.1-6.

[12] [43] Comparez la crainte de David exprimée en 1S 27.1 avec 24.20 ; 25.29 ; 26.24.

[13] [44] On trouve des études beaucoup plus critiques de la vie de David dans des biographies récentes, comme Steven L. McKenzie, King David : A Biography, Oxford, Oxford University Press, 2000, et Baruch Halpern, David’s Secret Demons : Messiah, Murderer, Traitor, King, Grand Rapids, Eerdmans, 2001. À la différence de cet article, ces biographies ne cherchent pas à présenter le portrait biblique de David. Elles préfèrent lire le récit biblique « à rebrousse-poil » (McKenzie, 45) ou imaginer les événements « à partir d’une position politique et idéologique opposée à celle du texte » (Halpern, xv). Elles peuvent, toutefois, être utiles à certains égards pour ceux qui veulent étudier la vie de David à partir des livres de Samuel. Premièrement, elles nous obligent à lire le texte très attentivement et à éviter le piège de passer sous silence les aspects négatifs du comportement de David ou d’une interprétation de ses actions trop positive. Deuxièmement, elles montrent à quel point la position de David était parfois délicate, les apparences étant contre lui en plusieurs occasions (voir p. ex. 1S 22.2 ; 2S 3.13-14 ; 16.8 ; 21.8-9).

[14] [45] Notez que le même verbe חרה est utilisé pour la réaction de Dieu en 2S 6.7 et la réaction de David en 6.8 (même s’il y a une petite différence puisque אַף en 6.7 ne réapparaît pas en 6.8).

[15] [46] La décision de David de ne pas prendre l’arche avec lui quand il fuyait devant Absalom (2S 15.25-26) montre également qu’il avait appris la bonne attitude à avoir vis-à-vis de l’arche.

[16] [47] Voir aussi 1S 10.8. Sur la relation entre 10.8 et 13.1-15, voir V. Philips Long, The Art of Biblical History, Foundations of Contemporary Interpretation 5, Grand Rapids, Zondervan, 1994, 205-218.

[17] [48] Concernant l’humilité de David, voir aussi 2S 7.18 ; 22.28.

[18] [49] Hébreu : בּרךְ Piel « bénir », un euphémisme pour « maudire », comme en 1R 21.10, 13 ; Ps 10.3 ; Job 1.11 ; 2.5, 9 ; cf. HAL, 153b.

[19] [50] David J.A. Clines, Job 1-20, WBC 17, Dallas, Word Books, 1989, 15 ; Ellen van Wolde, « A Text-Semantic Study of the Hebrew Bible, Illustrated with Noah and Job », JBL 113, 1994, 31-32.

[20] [51] Ellen van Wolde, Meneer en Mevrouw Job : Job in gesprek met zijn vrouw, zijn vrienden en God, Baarn, Ten Have, 1991, 24-26.

[21] [52] Cf. Clines, Job 1-20, 39.

[22] [53] Voir, par ex., Ps 10.1 ; 22.1 ; 42.9 ; 44.23-24 ; 88.14.

[23] [54] Cf. Clines, Job 1-20, 54 : « Il s’agit plutôt d’une sorte de confiance que Dieu sait ce qu’il fait. »

[24] [55] Pour une réfutation de l’idée selon laquelle l’expression « Job ne pécha point par ses lèvres » implique qu’il pécha dans son cœur, voir Clines, Job 1-20, 55.

[25] [56] Voir, p. ex., Job 4.7-8 ; 11.6, 13-15 ; 22.5-11 ; 34.10-11 ; 36.6-7.

[26] [57] Voir Job 7.20-21 ; 9.21-22 ; 10.7 ; 23.10-12 ; 27.5-6.

[27] [58] Cf. aussi Job 9 ; 19.6-7 ; 30.20.

[28] [59] On trouve la même idée en Ecclésiaste 12.1.

[29] [60] L’imparfait anebainon en 3.1 peut être compris dans ce sens ; ainsi, p. ex., Simon J. Kistemaker, Exposition of the Acts of the Apostles, New Testament Commentary, Grand Rapids, Baker, 1990, 120. Toutefois, il semble tout aussi probable que l’imparfait décrive la montée de Pierre et Jean au Temple, qui a été interrompue par l’action de l’homme boiteux (v. 3).

[30] [61] Kistemaker, Expositions, p. 376, déduit de Ps 55.17 et Dn 6.10 que le matin, midi et le soir étaient les moments de la prière privée en Israël, mais son argument n’est pas concluant ; voir aussi F.F. Bruce, The Acts of the Apostles : The Greek Text with Introduction and Commentary, 3e éd., Grand Rapids, Eerdmans, 1990, 254.

[31] [62] En 2P 1.14, Pierre fait peut-être allusion à ces paroles de Jésus ; cf. P.H.R. van Houwelingen, 2 Petrus en Judas : Testament in tweevoud, Commentaar op het Nieuwe Testament, Kampen, Kok, 1993, 43-44.