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Chapitre 11. De Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, unique Sauveur du monde

Chapitre 11. De Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, unique Sauveur du monde

1. Nous croyons et nous enseignons que le Fils de Dieu, notre Seigneur Jésus-Christ, a été prédestiné et établi par le Père, de toute éternité, pour être le Sauveur du monde. De même, nous croyons qu’il a été engendré du Père d’une manière ineffable, non seulement quand il a assumé notre chair dans le sein de la vierge Marie, ou un peu avant la fondation du monde, mais encore de toute éternité. Esaïe dit: Qui racontera sa génération?1 [1]Et Michée: Son origine remonte au lointain passé, aux jours d’éternité2 [2]. Jean, de même, dit dans l’Evangile: Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu3 [3].

2. Ainsi le Fils, pour ce qui est de sa divinité, est égal et consubstantiel au Père. Il est vrai Dieu, non seulement de nom ou par adoption, ou à cause d’une dignité conférée, mais dans sa substance et sa nature4 [4]. Comme le dit l’apôtre Jean ailleurs: C’est lui le Dieu véritable et la vie éternelle5 [5]. Et l’épître aux Hébreux, semblablement: Il l’a établi héritier de toutes choses, et c’est par lui qu’il a créé les mondes. Ce Fils, qui est le rayonnement de sa gloire et l’expression de son être, soutient toutes choses par sa parole puissante6 [6]. Le Seigneur lui-même dit dans l’Evangile: Père, glorifie-moi auprès de toi-même de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que le monde fût7 [7]. Et il est écrit ailleurs dans l’Evangile: Les Juifs cherchaient à le faire mourir, parce qu’il disait que Dieu était son propre Père, se faisant ainsi lui-même égal à Dieu8 [8].

3. Nous avons donc en abomination la doctrine impie d’Arius et de tous les Ariens contre le Fils de Dieu, et surtout les blasphèmes de l’Espagnol Michel Servet et de tous ses sectateurs. En effet, Satan a pour ainsi dire ressorti de l’enfer ces doctrines contre Dieu le Fils, et il les a répandues avec impudence et impiété par toute la terre.

4. Nous croyons, de même, et nous enseignons que le Fils éternel de l’éternel Dieu fut fait le Fils de l’homme, de la postérité d’Abraham et de David. Il n’a pas été engendré par un homme, ainsi que le prétendait Ebion, mais il a été conçu en toute pureté par le Saint-Esprit. Et il est né de Marie, qui est demeurée vierge, ainsi que l’histoire de l’Evangile nous l’explique en détail9 [9]. L’épître aux Hébreux déclare encore: Ce n’est pas des anges, assurément, qu’il prend la nature, mais c’est de la descendance d’Abraham qu’il prend la nature10 [10]. L’apôtre Jean dit, de même: Tout esprit qui ne confesse pas Jésus venu en chair n’est pas de Dieu11 [11]. La chair du Christ n’a donc pas été imaginaire ou apportée du ciel, comme l’ont rêvé Valentin et Marcion.

5. De plus, l’âme de notre Seigneur Jésus-Christ n’a pas été créée sans sentiment ou raison, comme l’affirmait Apollinaire; son corps n’a pas été sans âme, ainsi qu’Eunomius l’enseignait. Mais il a eu une âme raisonnable et un corps sensible. Et c’est avec ces sens-là qu’il a éprouvé de vraies douleurs au temps de sa Passion, comme il en a lui-même témoigné: Mon âme est triste jusqu’à la mort12 [12], et: Maintenant mon âme est troublée13 [13].

6. Nous reconnaissons donc qu’il y a, dans notre seul et unique Seigneur Jésus-Christ, deux natures ou substances, l’une divine et l’autre humaine14 [14]. Et nous disons qu’elles sont conjointes et unies de telle sorte qu’elles ne sont ni absorbées l’une par l’autre, ni confondues ou mélangées; mais les propriétés de chaque nature sont permanentes, étant conservées et unies en une seule personne. Par conséquent, nous adorons un seul Christ, notre Seigneur, et non pas deux: un seul vrai Dieu et vrai homme, consubstantiel au Père quant à sa nature divine, et de la même substance que nous quant à son humanité, nous étant en toutes choses semblable, excepté le péché15 [15].

7. De la sorte, de même que nous avons en horreur la doctrine de Nestorius qui, du seul Christ, en faisait deux et dissolvait ainsi l’unité de la personne, de même, nous rejetons la folie d’Eutychès et des Monothélites, ou Monophysites, qui abolissaient les propriétés de la nature humaine.

8. Nous n’enseignons donc en aucune manière que la nature divine en Christ ait souffert, ou que le Christ soit encore dans ce monde ou partout présent selon sa nature humaine. En effet, nous ne pensons ni ne croyons que le corps du Christ ait cessé d’être un véritable corps suite à sa glorification, ou qu’il ait été déifié ou même divinisé au point d’avoir été dépouillé de ses propriétés corporelles et psychiques, ou qu’il ait été transformé en la nature divine et soit devenu avec elle une seule substance.

9. Par conséquent, nous n’approuvons ni ne recevons les subtilités spécieuses et les arguments compliqués et obscurs de Schwenkfeld ou d’autres, qui ne cessent de se contredire sur ces sujets; et nous ne sommes aucunement Schwenkfeldiens.

10. De plus, nous croyons que notre Seigneur Jésus-Christ a réellement souffert et qu’il est mort pour nous dans la chair, comme le dit Pierre16 [16]. Nous avons donc en abomination la folie impie des Jacobites et de tous les Turcs, qui considèrent la Passion du Seigneur comme une exécration. Cependant nous ne nions pas, suivant les paroles de Paul, que le Seigneur de gloire a été crucifié pour nous17 [17]. En effet, nous recevons dans une attitude de piété et de révérence la communication des attributs et nous y faisons appel, conformément à l’Ecriture. Cette doctrine a été universellement enseignée dans l’Antiquité pour expliquer et harmoniser certains passages de l’Ecriture qui sembleraient se contredire.

11. Nous croyons et nous enseignons que ce même Seigneur Jésus-Christ est ressuscité d’entre les morts avec un vrai corps — celui dans lequel il a été crucifié et est mort. Il n’est pas ressuscité avec une autre chair que celle de sa sépulture, ni de façon spirituelle, mais en gardant son vrai corps. De la sorte, lorsque les disciples croyaient voir l’esprit du Seigneur, il leur montra ses mains et ses pieds, qui portaient les marques des clous et des blessures. Et il ajouta: Voyez mes mains et mes pieds, c’est bien moi; touchez-moi et voyez; un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai18 [18].

12. Nous croyons que notre Seigneur Jésus-Christ, dans cette même chair, est monté par-delà tous les cieux visibles au ciel même, au trône de Dieu et à la demeure des saints glorifiés, à la droite de Dieu le Père. Or, bien que cela signifie que le Christ participe à une même gloire et à une même majesté que le Père, néanmoins, cette expression se réfère aussi à un lieu précis. Le Seigneur en parle dans l’Evangile, disant: Je vais vous préparer une place19 [19]; l’apôtre Pierre dit, de même: C’est lui que le ciel doit recevoir jusqu’aux temps du rétablissement de toutes choses20 [20].

13. Ce même Christ reviendra des cieux pour le jugement, lorsque l’iniquité aura atteint son comble dans le monde et que l’Antichrist, ayant corrompu la vraie religion, aura rempli toutes choses de superstition et d’impiété et qu’il aura dévasté l’Eglise dans le sang et le feu21 [21]. Le Christ reviendra alors pour délivrer les siens, détruire l’Antichrist par son avènement, et juger les vivants et les morts22 [22]. En effet, les morts ressusciteront et, en ce jour-là (qui est inconnu à toutes les créatures), ceux qui seront trouvés en vie seront changés en un instant, en un clin d’œil23 [23]. Et tous les fidèles seront pris ensemble dans les airs à la rencontre du Christ24 [24], afin qu’avec lui ils entrent dans le lieu de bénédiction et y vivent pour toujours. Mais les incrédules et impies descendront avec les démons en enfer, au feu éternel, sans jamais être délivrés de leurs tourments25 [25].

14. Nous condamnons donc tous ceux qui nient la véritable résurrection de la chair26 [26]ou qui, avec Jean de Jérusalem (contre lequel Jérôme a écrit), ne proposent pas un enseignement juste sur les corps glorifiés. Nous condamnons, de même, ceux qui croient que les démons et les méchants finiront tous par être sauvés et que leurs peines prendront fin à l’avenir. Car le Seigneur a clairement affirmé: Leur ver ne meurt pas, et le feu ne s’éteint pas27 [27]. Nous condamnons, de plus, les rêves rabbiniques affirmant qu’avant le jour du jugement il y aura sur la terre un âge d’or, et que les saints posséderont les royaumes du monde, ayant foulé aux pieds leurs ennemis. En effet, la vérité de l’Evangile28 [28]et la doctrine des apôtres29 [29]avancent un enseignement tout autre.

15. Par sa Passion, sa mort et tout ce qu’il a fait et souffert pour nous à partir de son incarnation, notre Seigneur a réconcilié le Père céleste avec tous les croyants30 [30]; il a expié le péché31 [31], dépouillé la mort, brisé la condamnation et l’enfer. Par sa résurrection d’entre les morts, il a ramené et restitué la vie et l’immortalité32 [32]. Il est ainsi notre justice, notre vie et notre résurrection, bref, la plénitude et la perfection de tous les fidèles, leur salut et leur entière suffisance. L’apôtre dit en effet: Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude, et vous avez tout pleinement en lui33 [33].

16. Par conséquent, nous enseignons et nous croyons que ce même Jésus-Christ, notre Seigneur, est l’unique et éternel Sauveur du genre humain, voire du monde entier: en lui ont été sauvés par la foi tous ceux qui, avant la Loi, sous la Loi et sous l’Evangile, ont obtenu le salut, ainsi que tous ceux qui seront sauvés jusqu’à la fin du monde. En effet, le Seigneur lui-même dit dans l’Evangile: Celui qui n’entre point par la porte dans la bergerie, mais qui y monte par un autre côté, celui-là est un voleur et un brigand34 [34]; je suis la porte des brebis35 [35]. Il dit encore, dans un autre passage du même Evangile: Abraham, votre père, a tressailli d’allégresse à la pensée de voir mon jour: il l’a vu et il s’est réjoui36 [36]. Et l’apôtre Pierre, de même: Le salut ne se trouve en aucun autre; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés37 [37]. Nous croyons donc que nous serons sauvés, comme nos pères, par la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ. L’apôtre Paul dit également: Nos pères ont tous mangé le même aliment spirituel, et ils ont tous bu le même breuvage spirituel, car ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait, et ce rocher était le Christ38 [38]. D’où nous lisons ce que Jean dit: le Christ est l’Agneau immolé dès la fondation du monde39 [39]. Et Jean-Baptiste témoigne que le Christ est l’Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde40 [40].

17. Nous déclarons donc ouvertement et nous prêchons que Jésus-Christ est l’unique Rédempteur et Sauveur du monde, notre Roi et Souverain Sacrificateur, le vrai Messie attendu. C’est lui, le Saint et le Béni, que toutes les préfigurations de la Loi et tous les oracles des prophètes ont représenté et promis, et que Dieu nous a accordé et envoyé, afin que nous ne nous attendions à aucun autre. Aussi, que reste-t-il à faire sinon que, tous, nous lui accordions tout l’honneur, que nous croyions et reposions en lui seul, que nous méprisions et rejetions tout autre secours pour notre vie? Car ils sont déchus de la grâce de Dieu et ne trouvent en Christ aucun profit, ceux qui cherchent leur salut ailleurs qu’en lui seul41 [41].

18. Pour dire sur ce sujet beaucoup de choses en peu de mots: nous croyons de tout notre cœur et nous professons de la bouche, en toute franchise, tout ce qui a été proposé par les Saintes Ecritures au sujet de ce mystère de l’incarnation de notre Seigneur Jésus-Christ, et qui est compris dans les symboles et décisions des quatre premiers et excellents conciles: conciles tenus à Nicée, à Constantinople, à Ephèse et à Chalcédoine. Nous retenons avec eux le Symbole d’Athanase, ainsi que tout autre symbole semblable, et nous condamnons tout ce qui leur est opposé. Nous retenons par conséquent, d’une manière entière et inviolable, la foi chrétienne, orthodoxe et catholique, sachant que ces symboles ne contiennent rien qui ne soit conforme à la Parole de Dieu et utile pour l’explication sincère de la foi.


1 [42] Es 53:8.

2 [43] Mi 5:1.

3 [44] Jn 1:1.

4 [45] Ph 2:6.

5 [46] 1 Jn 5:20.

6 [47] He 1:3 et 3.

7 [48] Jn 17:5.

8 [49] Jn 5:18.

9 [50] Mt 1:18ss.

10 [51] He 2:16.

11 [52] 1 Jn 4:3.

12 [53] Mt 26:38.

13 [54] Jn 12:27.

14 [55] He 4:14.

15 [56] He 4:16.

16 [57] 1 P 4:1.

17 [58] 1 Co 2:8.

18 [59] Lc 24:39.

19 [60] Jn 14:2.

20 [61] Ac 3:21.

21 [62] 2 Th 2:1-11; Ap 11:1-13; 13:1-10.

22 [63] Ac 17:31; 2 Th 2:8.

23 [64] Mc 13:32; 1 Co 15:51-52.

24 [65] 1 Th 4:17.

25 [66] Mt 15:41.

26 [67] 2 Tm 2:18.

27 [68] Mc 9:44, 46, 48.

28 [69] Mt 24 et 25.

29 [70] 2 Th 2; 2 Tm 3 et 4.

30 [71] Rm 5:10.

31 [72] Hé 1:3.

32 [73] Rm 4:25; 10:4; 1 Co 15:17; Jn 6:45; 11:25-26.

33 [74] Col 1:19; 2:10.

34 [75] Jn 10:1.

35 [76] Jn 10:7.

36 [77] Jn 8:56.

37 [78] Ac 4:12.

38 [79] 1 Co 10:3-4.

39 [80] Ap 13:8.

40 [81] Jn 1:29.

41 [82] Ga 5:4.