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Orientation homosexuelle: aspects médicaux – Un point de vue chrétien


Orientation homosexuelle: aspects médicaux
Un point de vue chrétien

Dr Calum MacKELLAR*

Résumé

Bien qu’un continuum étendu existe entre l’hétérosexualité, la bisexualité et l’homosexualité exclusive, il est généralement accepté que, dans notre société, les personnes, qui se déclarent homosexuelles représentent 3 à 4% de la population masculine et 1 à 2% de la population féminine.

Quant aux causes de l’homosexualité, de nombreuses explications, sociologiques ou physiologiques, ont été proposées. Aussi devient-il évident qu’aucun facteur ne peut, à lui seul, expliquer cette orientation sexuelle. Même s’il est reconnu que les origines de l’homosexualité sont, dans la majorité des cas, « environnementales », ce type de facteur ne peut être considéré comme exclusif. Pour une minorité d’homosexuels, une cause dominante, médicale, est de plus en plus évidente.

Il existe, au sein de la communauté chrétienne, une résistance importante et un grand embarras face à cette possible dimension physiologique de l’homosexualité. L’article suivant cherche à examiner l’homosexualité dans une perspective chrétienne et médicale, bien que certains arguments soient aussi pertinents pour l’homosexualité acquise, principalement par des causes sociologiques ou psychologiques.

A) La campagne pour les droits homosexuels

Pendant les vingt-cinq dernières années, les militants de Gay Rights ont appelé la société à cesser de considérer le style de vie homosexuel comme immoral, et à l’accepter comme une expression valide de ce qu’ils sont1 [1]. La revendication sous-jacente, derrière cette campagne, étant que l’homosexualité et l’hétérosexualité soient acceptées comme les termes d’égale valeur d’une alternative sexuelle, ce que propose le PACS (PActe Civil de Solidarité ). Cela a souvent été exprimé dans les déclarations telles que: « Vous pouvez dire que la pratique homosexuelle est contre nature et anormale; mais ce n’est pas contre ma nature, ni si peu que cela soit anormal pour moi. »2 [2]

Cependant, cet argument selon lequel le naturel et le normal seraient acceptables alors que le « non-naturel » et l’anormal ne le seraient pas, sans définitions précises des mots, ne peut pas être retenu comme base de jugement éthique moral. En effet, les définitions de la « normalité » comme étant « un état d’existence conforme aux niveaux habituels », et de ce qui est « naturel » comme ce qui n’est« pas artificiellement préparé ou éveillé », n’ont aucun rapport direct avec le mot « moralité » défini comme « un état relatif à un comportement humain bon ou mauvais »3 [3].

Suite à la confusion existant entre ces définitions, un grand nombre de raisonnements malheureux ont été soutenus par des scientifiques et par les médias. Par exemple, affirmer que les homosexuels, puisqu’ils ne sont pas responsables de l’état physique de leur cerveau, ne devraient pas être condamnés pour leurs actions, ni être privés de bonheur par des restrictions imposées à leur comportement, n’a pas de fondement valable. La discussion concernant « ce qui est naturel » est liée avec la moralité, bien qu’il n’existe aucun véritable rapport. Ce qui est inné n’est pas automatiquement moral.

Dans ce contexte, tout discours permettant à l’homosexuel d’échapper à la responsabilité de son comportement se trouve encouragé, qu’il soit ou non cohérent.

B) Les croyances de l’Eglise

Aujourd’hui, de nombreux chrétiens ont des opinions sur l’homosexualité qui s’appuient sur les mêmes arguments inadéquats que ceux du mouvement Gay Rights. Leur condamnation de la pratique homosexuelle comme « anormale » établit répétons-le, un faux lien entre la moralité et la normalité, qui mène à la conclusion que ce qui est anormal doit aussi être immoral.

Comme les militants Gay Rights, beaucoup de chrétiens ont été peu disposés à reconnaître l’homosexualité comme un désordre physiologique comparable, par exemple, à la cécité. Leurs objections à cette explication résultent de différentes craintes.

Pour quelques-uns, la peur que certaines formes d’homosexualité ne soient pas apprises, mais déterminées physiologiquement (génétiquement ou hormonalement), découle de celle qu’ils ont de perdre la maîtrise du processus « curatif » pour la personne homosexuelle. Ces personnes se raccrochent, en effet, à l’idée que « ce qui est un comportement appris peut être désappris »4 [4].

D’autres repoussent automatiquement toute nouvelle possibilité qui puisse contredire leurs modèles conservateurs et traditionnels de pensée. Cette situation devient alors tristement comparable à la difficulté évoquée par l’apôtre Pierre concernant l’annonce de l’Evangile aux Gentils et le problème de leur circoncision. Pierre a finalement été réprimandé par Dieu par l’intermédiaire de Paul pour son refus d’accepter l’étrange situation nouvelle, non conforme aux traditions théologiques (Ac 15).

Certains encore ont peur de ne plus pouvoir invoquer la responsabilité des personnes pour les caractéristiques négatives de l’homosexualité. Ils croient qu’on ne peut pas naître pécheur et ils refusent toute possibilité de nature à mettre en danger leur concept de Dieu contrôlant la sexualité humaine.

Enfin, quand aucun péché ne peut être imputé à la personne en cause, certains reviennent alors aux péchés des parents. Même s’il arrive que l’homosexualité soit souvent la conséquence de problèmes parentaux, ce n’est pas toujours le cas. La détresse et la souffrance peuvent être sans rapport avec un péché spécifique. L’exemple dans l’évangile de Jean (9:2) le montre: les disciples de Jésus lui ont demandé: « Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents pour qu’il soit né aveugle? » « Ni cet homme ni ses parents n’ont péché, a répondu Jésus, mais cela s’est passé afin que l’œuvre de Dieu puisse être manifestée dans sa vie. »

Dans une perspective théologique, il est essentiel que les chrétiens se rappellent que les conséquences de la chute d’Adam ne se ressentent pas uniquement dans la société humaine comme telle. Le péché a aussi atteint la nature même de l’homme en suscitant des dérèglements physiologiques, tristes et affligeants. Par conséquent, il serait imprudent pour les chrétiens de déclarer qu’on ne peut pas naître homosexuel, pour des causes génétiques ou physiologiques5 [5].

Pendant des années, l’Eglise a soutenu que le soleil tournait autour de la terre et a condamné les déclarations contraires comme hérésies. Ce n’est que lorsque la véritable situation fut prouvée que l’Eglise dut humblement admettre son erreur. Ignorer ou nier la recherche scientifique qui suggère une prédisposition génétique ou hormonale dans certaine orientation homosexuelle serait alors aussi préjudiciable et irresponsable.

La question concernant l’existence d’une cause biologique à l’homosexualité a souvent été posée afin de déterminer si l’homosexualité était une maladie ou un péché, ou si cette prédisposition devait être acceptée par la société6 [6].

Pourtant une tendance homosexuelle, qu’elle soit innée ou le produit d’une situation environnante, n’a aucun lien direct avec la moralité si la personne continue à prendre la responsabilité de ses décisions.

Or la responsabilité personnelle est un « acquis » humain de base qui confère sa dignité à l’homme, et cela même si la recherche neurologique actuelle chez l’homme montre de plus en plus ce que l’on pourrait reconnaître comme des prédispositions au mal. L’homosexualité, la prédisposition à la colère, la violence ou l’alcoolisme ne sont que quelques-uns parmi un grand nombre de traits humains que les psychiatres et les neurochimistes estiment, maintenant, être favorisés par des dérèglements physiologiques dans le cerveau et pas seulement par un déséquilibre sociologique. L’équilibre dans les procédures psychiatriques éthiques doit toujours être ménagé afin que la responsabilité de la personne ne soit pas ignorée.

Si un homme, par exemple, remarque son attraction pour de beaux adolescents, il peut soit choisir d’obéir à ses pulsions et chercher des rapports physiques avec eux, soit écouter sa conscience et chercher de l’aide en dépit des difficultés et des détresses présentes. Son choix et sa responsabilité restent présentes.

Les chrétiens, même s’ils ne peuvent pas toujours comprendre, pour l’instant, ce qui fonde les principes bibliques opposés à la pratique homosexuelle, placent leur confiance dans la vérité, la bonté et la grâce de la Parole de Dieu. L’obéissance aux préceptes divins, la reconnaissance de l’amour profond de Dieu, de sa grâce et de sa sagesse, fait naître plus de force, chez la personne homosexuelle, pour continuer sur la route étroite, que tout autre argument contemporain. Les souffrances et la détresse rencontrées par le chrétien homosexuel, qui sont décrites dans un article émouvant du pasteur William Still, en Ecosse7 [7], sont très réelles et, parfois, effrayantes, mais Dieu n’abandonnera jamais ni ne délaissera son enfant.

Il arrive qu’aucune explication ne puisse être donnée aux profondes souffrances éprouvées par la personne homosexuelle. Une possible acceptation de sa participation, d’une façon mystérieuse, aux souffrances du Christ – qui le comprend et qui l’aime – est peut-être, alors, la seule solution possible pour comprendre cette situation difficile. (1 P 4:13)

C) Réaction de la profession médicale

L’histoire troublée du désir de la profession médicale de traiter l’homosexualité comme une maladie est illustrée par l’exemple de l’Association psychiatrique américaine (APA). Après quelques hésitations, les membres de l’association ont décidé, le 15 décembre 1973, par un vote, de modifier la liste des maladies mentales de 1968, qui incluait l’homosexualité. Sur les 15 membres, 13 ont voté pour effacer l’homosexualité de cette liste.

Il a été alors proposé que l’homosexualité soit considérée seulement comme une orientation sexuelle perturbée, qui n’affecterait pas tous les homosexuels, mais seulement ceux qui seraient insatisfaits de leur situation (et se considéreraient eux-mêmes comme « malades »).

La communauté gay a crié victoire, tandis qu’un grand nombre de psychanalystes et de psychiatres refusaient d’accepter la décision de l’APA et ont demandé son annulation. Un référendum a été proposé en avril 1974. Après un lobbying intensif du mouvement Gay Rights, 58% des 10 000 votants ont confirmé la décision de l’APA d’exclure l’homosexualité de sa liste des désordres mentaux.

Etant donné qu’un scrutin démocratique n’est pas vraiment l’équivalent d’un résultat scientifique8 [8], un grand nombre de défenseurs de l’homosexualité en tant que désordre ont persisté à influencer le monde médical dans la recherche d’un traitement. Pour certains, si l’homosexualité n’était plus une maladie, elle constituait encore une « déviance » ou un « fonctionnement défectueux » chez le patient. Cependant, la ligne étroite entre déviance et maladie n’est pas caractérisée9 [9] et on en revient à redéfinir les limites de la sexualité considérée comme « normale ».

De plus en plus d’articles paraissent aujourd’hui dans la presse médicale et démontrent l’existence de causes médicales différentes dans l’orientation homosexuelle. Pour une critique récente de ces propositions, on peut se référer à l’article du Dr J. Bancroft10 [10], qui classe les recherches médicales sous quatre titres: les mécanismes hormonaux, la structure du cerveau, le fonctionnement neuropsychologique et les facteurs génétiques.

Il conclut que le phénomène d’orientation sexuelle est toujours la conséquence d’un processus d’un développement multifactoriel. Aussi, les composantes biologiques devraient-elles être considérées en même temps que des facteurs psychologiques complexes.

D) Ethique et homosexualité

Durant le XXe siècle, l’homosexuel a acquis une personnalité, avec un passé, une enfance et une histoire. Malheureusement, il est aussi devenu une espèce propre. En effet, la sexualité est devenue pour l’homosexuel la vérité ultime de son existence11 [11].

Cette situation fâcheuse s’est développée, malgré la médicalisation de l’homosexualité, qui aurait dû éviter tout jugement moral. La distinction n’est plus alors faite entre la maladie et le vice, entre le désordre mental et le désordre moral.

La stigmatisation de l’homosexuel est sans nul doute un des résultats du développement de la classification de la sexualité. Ce sont, hélas! les homosexuels eux-mêmes qui, avec l’aide des sexologues, désireux d’améliorer leur présence dans la société, ont permis au « déviant » d’être enfermé dans l’anormal12 [12], l’anormal étant alors enchaîné à l’immoralité.

J. Weeks13 [13] a démontré la responsabilité des sexologues dans la formation du type même de l’homosexuel. D’autres chercheurs estiment possible qu’ils l’aient effectivement créé14 [14]. Ce sont les sexologues qui sont devenus les juges de la normalité et de la manière dont elle devrait être vécue. Toutes sortes d’expériences hormonales et chirurgicales ont résulté de leurs efforts pour changer les tendances homosexuelles en une « sexualité correcte ».

La société contemporaine n’a pas libéré l’homosexuel de sa prison15 [15]. Après cent cinquante ans de réflexion, on ne connaît toujours pas précisément les origines de ce comportement mal défini. La multiplicité des explications ne sert qu’à renforcer le mystère et, par conséquent, l’étrangeté.

L’image négative de l’homosexualité a aussi souligné les aspects positifs et désirables de l’hétérosexualité16 [16]. Le rejet des différences solitaires et anormales de la personne homosexuelle par la majorité hétérosexuelle sert aussi à affirmer et à confirmer l’hétérosexualité de celle-ci.

Quel avenir pour l’homosexuel ?

Pendant les trente dernières années, le mouvement homosexuel a connu le même destin que les autres minorités. Après un temps de réclamation du droit à être différent, ils comprendront, peut-être, les dangers de persévérer sur cette route, qui mène à la stigmatisation et à la « ghettoïsation »17 [17]. La différence n’est plus alors choisie, mais imposée par la majorité hétérosexuelle.

Pour les homosexuels qui ne sont pas chrétiens, seule une reconnaissance de leurs actes physiques comme étant un péché devant Dieu leur permettra de comprendre et d’accepter leurs déséquilibres. Ils apprendront alors que Dieu ne les considère pas comme des homosexuels, mais comme des êtres humains qu’il aime en dépit de leur orientation sexuelle.

Pour les chrétiens affligés par l’homosexualité, la preuve médicale, bien qu’encore complexe, peut offrir une possibilité, pour quelques-uns, d’accepter leur situation comme un désordre physiologique comparable aux autres fonctionnements défectueux qu’il n’est pas toujours possible de soigner avec succès. Le fait que l’immoralité ne soit pas parmi les causes de leur homosexualité peut en encourager quelques-uns à lutter contre leur autocondamnation. Cependant, la morale intervient dans ce que l’homosexuel souffrant fait avec son fardeau.

Ses amis hétérosexuels doivent, par conséquent, chercher à alléger cette croix en lui offrant une compassion profonde et une assistance dans son combat contre toute pratique homosexuelle. Une aide considérable lui sera nécessaire pour résister aux tentations toujours présentes et profondes qui jaillissent dans son cerveau. Une véritable assistance et une grande solidarité devraient être effectives, tout en évitant d’être source de situations dangereuses et traumatisantes.

Cela paraît peut-être difficile de prime abord, mais un encouragement peut être trouvé en considérant comment ont été traités les problèmes rencontrés par d’autres personnes désavantagées cherchant à être intégrées dans la société.

L’Eglise apprendra alors à accepter la personne homosexuelle comme un enfant profondément aimé par Dieu, tout en rejetant la pratique homosexuelle.

Des groupes chrétiens d’entraide, soutenus par des conseillers compétents, existent déjà pour les homosexuels; ils leur procurent une assistance compatissante et encourageante18 [18].


* C. MacKellar est chercheur à l’European Bioethical Research, à Edimbourg (Ecosse). Son texte a été rédigé avec l’aide du Dr Tom Brown, du département de psychiatrie de l’hôpital St. John, à Howden, Ecosse.

1 [19] J.L. Fletcher, Jr., Journal of Biblical Ethics in Medicine, 1 (1987/3), 43-52.

2 [20] J. Stott, Issues Facing Christians Today (Marshall Morgan & Scott, 1984), 313.

3 [21] G.N. Garmonsway, English Dictionary (Harmondsworth, GB: Penguin Books Ltd., 1980).

4 [22] J. Konrad, You don’t have to be Gay (Tunbridge Wells, Kent: Monarch Publications, 1993).

5 [23] P. Monger, European Journal of Genetics in Society, 1 (1995/2), 2-4.

6 [24] J. Bancroft, British Journal of Psychiatry, 164, (1994), 437-440.

7 [25] W. Still, The Rutherford Journal, 1 (1994/2).

8 [26] E. Badinter, XY. De l’identité masculine (Paris: Odile Jacob, 1992).

9 [27] P. Thuillier, La recherche, 20 (1985/213), 1128-1139.

10 [28] J. Bancroft, British Journal of Psychiatry, 164, (1994), 437-440.

11 [29] E. Badinter, op. cit.

12 [30] E. Badinter, op. cit.

13 [31] J. Weeks, « Question of Identity », in Pat Caplan (éd.), The Cultural Construction of Sexuality (Londres, NY: Routledge, 1987), 31-51.

14 [32] J.N. Katz, « The Invention of Heterosexuality », in Socialist Review, 1 (1990), 7-34.

15 [33] E. Badinter, op. cit.

16 [34] Ibid.

17 [35] Ibid.

18 [36] Pour plus d’information, contacter « Devenir Un en Christ », BP La Rochette, 77012 Melun Cedex.